Les Aventures De Maya L’abeille (Livre à Chapitre)


Chapitre 1: Maya l’Abeille Apprend à Voler

Maya est une petite abeille pétillante, têtue et pleine de curiosité. Dès sa naissance, elle mène d’innombrables aventures. 

Dernière-née d’une vaste ruche nichée près d’une ruine abandonnée au cœur de la forêt, Maya a beaucoup de frères et sœurs. Mlle Cassandra, une apicultrice avisée, veille avec soin sur la naissance des nouvelles abeilles. Bientôt, Maya se distingue par son insatiable curiosité. À peine éveillée, elle demande à Mlle Cassandra : « Oh ! Maya c’est mon nom ? Pourquoi vous m’avez donné ce nom ? » Mlle Cassandra répond avec un sourire : « Eh bien ! C’est parce que tout le monde doit avoir un nom. »

Le jour de la naissance de Maya, un événement important se prépare : la moitié des abeilles de la ruche doit se rassembler en essaim pour éviter le surpeuplement.

Dès ses premières heures, Maya apprend beaucoup de choses grâce à Mlle Cassandra. C’est également ce jour-là qu’elle fait la connaissance de Willie qui est un gentil abeillaud mais un peu abruti. En fait, il suit les leçons pour la deuxième fois.

« Nous, les abeilles, sommes des travailleuses infatigables », explique Mlle Cassandra à la petite Maya et aux autres jeunes abeilles. « Chaque jour, nous faisons du miel. Il est donc essentiel de savoir quelles fleurs sont les plus adaptées à la récolte. Je vais tout vous enseigner, et vous devez également connaître les dangers qui nous entourent. Par exemple, le frelon est notre pire ennemi. »

Le lendemain matin, Maya se réveille dans une ruche en plein bouillonnement. Trop d’abeilles sont restées à l’intérieur, provoquant une montée de la température. La ruche devient trop chaude que le miel commence à fondre. C’est sans doute, une catastrophe pour les nouveaux œufs pondus par la reine.

Pour refroidir la ruche, toutes les abeilles battent frénétiquement des ailes pour créer un courant d’air. Maya, bien décidée à aider, se joint à l’effort. À mesure qu’elle agite ses ailes de plus en plus vite, elle réalise avec émerveillement qu’elle s’élève dans les airs. Elle vole! Ce n’est cependant que dans l’après-midi qu’elle reçoit sa première véritable leçon de vol. 

Rayonnante d’excitation, elle parcourt la ruche en racontant à qui veut l’entendre qu’elle va enfin apprendre à voler, et que c’est Mlle Cassandra qui sera son professeur.

C’est le moment pour Maya d’apprendre à voler de ses propres ailes, un véritable plaisir pour elle. En survolant les champs, elle s’essaie à la récolte de miel et fait la rencontre de Flip, une sauterelle dynamique qui saute tout le temps, incapable de rester en place. « C’est exactement comme ça que les sauterelles vivent », lui explique-t-il en sautillant joyeusement. Il lui promet de lui venir en aide si jamais elle se retrouvait en difficulté. « D’ailleurs, cela va certainement avoir lieu, avec ton fichu caractère », ajoute-t-il en riant.

En virevoltant de coquelicot en tulipe, Maya découvre comme la vie au grand air est exaltante. Rapidement, elle décide qu’elle ne retournera pas à la ruche.
« Pourquoi revenir là-bas ? » réfléchit-elle. « Je ne m’y sens pas bien du tout, et je ne comprends pas pourquoi tout ce travail acharné serait nécessaire. Je préfère rester dehors et profiter de la liberté. »

Alors que le soleil se couche et que l’obscurité gagne le ciel, Maya cherche un endroit pour passer la nuit. Elle repère une jolie fleur et décide que ce sera son lit pour ce soir. Fatiguée à force de ses premiers vols, elle tombe dans les bras de Morphée aussitôt.

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Chapitre 2: Maya L’Abeille Chez La Rose

Le soleil était déjà haut dans le ciel lorsque Maya ouvrit les yeux, bercée par le doux balancement de la fleur où elle s’était endormie la veille. 

Les pétales dansaient doucement sous l’effet d’une brise légère. « On dirait qu’ils dansent juste pour moi ! » s’exclama-t-elle, encore ravie des aventures de ce jour-là.

« Je ne retournerai jamais à la ruche, c’est décidé ! » pensa-t-elle avec détermination. Rien qu’à l’évocation de Mlle Cassandra et de ses leçons, un léger frisson lui parcourut l’échine. Elle revoyait les scènes répétitives de la ruche : entrer, sortir, transporter du miel, jour après jour, sans fin ni variété. Cette existence monotone et mécanique lui semblait insupportable, celle-là n’était décidément pas faite pour elle. Maya voulait savourer sa liberté, explorer le monde à sa façon, quoi qu’il arrive !

Pendant ce temps, son estomac commençait à gargouiller légèrement, signe qu’il était temps de trouver quelques nourritures à manger. Au loin, elle aperçut une magnifique fleur rouge qui semblait l’appeler. Maya s’envola aussitôt dans sa direction. En chemin, elle effleura une grande feuille, faisant tomber une goutte d’eau qui se brisa au sol en une myriade de petites gouttelettes scintillantes. Quel beau spectacle !

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La fleur rouge dégageait un parfum doux et sucré qui attira immédiatement Maya. À l’entrée de la coupe fleurie, sur le bord inférieur des pétales, se trouvait un petit scarabée. Plus petit qu’elle, il arborait des ailes brunes et une poitrine noire. Son regard sérieux et impassible était fixé sur Maya, qui, pleine d’entrain, le salua chaleureusement.

« Que fais-tu ici ? » demanda le scarabée.

 Ignorant la question, Maya répondit par une autre : « Quelle est cette belle fleur ? Pourrais-tu me dire son nom ? » 

Le scarabée s’éclaffa. Il aurait été jugé inapproprié par les abeilles, toujours promptes à prendre les questions au sérieux. « Tu dois être toute nouvelle ici, » répondit-il. Il insinuait clairement qu’elle venait tout juste de naître et ne pouvait pas encore tout connaître.

« C’est une rose », répondit le scarabée avec simplicité. « Maintenant, tu le sais. »

Même si Maya jugeait les manières du scarabée quelque peu abruptes, elle ne pouvait nier qu’il dégageait une sorte de charme simple et sincère. 

« Nous avons emménagé ici il y a quatre jours », reprit le scarabée. « Veux-tu entrer et jeter un coup d’œil ? »

Maya hésita un instant. L’idée de pénétrer à l’intérieur de la fleur l’intriguait autant qu’elle l’intimidait. Mais sa curiosité prit rapidement le dessus. Elle fit quelques pas prudents en avant.

Le scarabée écarta délicatement un pétale translucide, dévoilant un passage secret, et invita Maya à le suivre vers l’intérieur. Ensemble, ils traversèrent les pièces étroites baignées d’une lumière tamisée et des murs parfumés. 

« Quelle maison enchanteresse ! » s’exclama Maya avec émerveillement. « Et cette odeur, sent si agréable ici ! » 

Le scarabée, flatté par l’admiration de Maya, esquissa un sourire satisfait.

« Il faut de la sagesse pour choisir une bonne maison, » dit-il avec une certaine fierté. « Un vieux proverbe dit : Dis-moi où tu vis, et je te dirai qui tu es. » Il marqua une pause avant d’ajouter aimablement : « Souhaitez-vous un peu de nectar ? » 

 « Oh, oui, avec plaisir ! » répondit Maya, réalisant soudain à quel point elle avait l’estomac vide.

Le scarabée laissa Maya seule un instant pour aller chercher du nectar. Pendant ce temps, elle en profita pour plonger son nez dans un pétale rouge éclatant, s’imprégnant de son parfum enivrant.

« La vie est si magnifique ici, » murmura-t-elle. « C’est infiniment plus agréable que l’agitation incessante des abeilles dans la ruche. Là-bas, tout le monde ne fait qu’aller et venir pour récolter du miel. Mais ici, le silence est exquis. » 

Tout à coup, un vacarme retentit derrière les murs. Maya entendit le scarabée grogner de colère. Il semblait pousser quelqu’un avec brusquerie. Un instant plus tard, des bruits de pas précipités s’éloignèrent à l’extérieur. Le scarabée reparut, visiblement irrité, et posa un bol de nectar devant Maya avec humeur. « C’est insupportable ! » s’exclama-t-il en grognant. « On ne peut échapper à ces parasites nulle part. Ils ne vous laissent jamais en paix ! » 

Maya, affamée, attrapa le nectar sans même penser à le remercier. Entre deux gorgées, elle demanda d’une voix étouffée, la bouche encore pleine : « Qui était-ce ? »

« Une fourmi ! » siffla le scarabée, l’indignation dans chaque mot. « Ces créatures se croient tout permis. Elles s’introduisent directement dans mon garde-manger, sans demander la moindre permission, et repartent avec ce qu’elles veulent, comme si tout leur appartenait ! Si je ne comprenais pas que ces malotrus ne connaissent rien aux bonnes manières, je les traiterais sans hésitation de voleuses ! »

C’est à ce moment-là qu’il se souvient soudain de ses propres manières. « Désolé », dit-il en se tournant vers Maya. « J’ai oublié de me présenter. Je m’appelle Peter, de la famille des scarabées roses ».

Maya, un peu timide, répondit avec un sourire : « Et moi, je m’appelle Maya. Je suis ravie de faire votre connaissance. » 

Elle observa attentivement Peter, qui s’inclina plusieurs fois d’une manière théâtrale, tout en déployant ses antennes brunes, semblables à deux petits éventails. Maya trouvea ce geste fascinant.

« Tes antennes sont vraiment magnifiques », dit-elle avec admiration.

Peter, visiblement flatté, répondit : « Merci beaucoup. Aimerais-tu voir l’autre côté de cette fleur ? »

« Oh oui, avec plaisir ! » répondit Maya.

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Le scarabée rose fit tourner doucement ses antennes en éventail, laissant un rayon de soleil glisser sur elles dans un éclat doré.

« Superbe, n’est-ce pas ? » demanda-t-il.

« Je pense que c’est très spécial ! s’exclame Maya. « Les miens ne sont pas aussi remarquablement beaux. 

Peter hocha la tête avec un air sage. « Oh, chacun a ses propres caractéristiques. Par exemple, toi, tu as de très beaux yeux, et la couleur dorée de ton corps est particulièrement attirante. »

Maya était aux anges, son cœur battit la chamade. C’était la première fois que quelqu’un lui disait qu’elle était belle. Elle rayonna d’un bonheur sincère.

En reprenant une nouvelle gorgée de nectar, elle observa : « C’est un miel d’excellente qualité ! »

« Prends-en encore, » dit Peter avec un sourire, légèrement surpris par l’appétit de sa petite invitée. « Il y a aussi du nectar rosé si tu as soif. »

« Merci beaucoup, » répondit Maya, « mais maintenant, il est temps pour moi de reprendre mon envol, si tu n’y vois pas d’inconvénient. »

Le scarabée rose éclata de rire. « Voler, toujours voler, » dit-il. « C’est vraiment dans le sang des abeilles. Je ne comprends pas cette vie si agitée. Rester au même endroit a aussi ses avantages, tu ne trouves pas ? »

Peter écarta poliment un rideau rouge avec sa patte. « Je vais t’accompagner jusqu’à notre feuille d’observation, » proposa-t-il. « C’est un excellent point de départ pour voler. »

« Oh, merci, » répondit Maya avec enthousiasme, « mais je peux décoller de n’importe où. »

« Voilà un avantage que tu as sur moi, » dit Peter avec un petit rire. « J’ai toujours du mal à déplier mes ailes arrière. » Il lui serra la main avec chaleur, puis écarta le dernier rideau pour dévoiler le ciel.

« Oh, le ciel bleu ! » s’exclama Maya avec émerveillement. « Au revoir, Peter ! »

« Au revoir ! » appela Peter, restant sur le pétale supérieur pour voir Maya s’élever gracieusement dans la lumière dorée et l’air pur et limpide du matin.

Poussant un soupir, Peter retourna dans sa maison parfumée de roses fraîches, puis entonna une chanson matinale joyeuse pour lui-même.


Chapitre 3: Maya L’Abeille Et La Libellule

Avec un moral d’acier et un enthousiasme débordant pour de nouvelles aventures, Maya survolait les vertes prairies baignées de soleil. En chemin, elle croisa de nombreux autres insectes, qui la saluaient allègrement. 

Elle aimait savourait chaque instant de sa liberté. Pourtant, un petit pincement au cœur venait parfois gâcher sa joie. Elle ne pouvait s’empêcher de penser à sa colonie d’abeilles, laborieuse et dévouée, qui poursuivait inlassablement son travail quotidien.

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Au bord d’un étang, Maya se posa sous la large feuille d’un nénuphar. Pendant qu’elle lissait soigneusement ses ailes, une mouche bleue atterrit brusquement sur la feuille voisine.

« Qu’est-ce que tu fais sur ma feuille ? » lança la mouche d’un ton grincheux.

Surprise par cette remarque, Maya répliqua plus fort qu’elle ne l’aurait voulu : « Est-ce si grave que je me repose ici un moment ? »

Elle se rappela alors que Mlle Cassandra lui avait dit que les abeilles étaient respectées dans le monde des insectes en raison de leur rôle crucial. C’était l’occasion de vérifier si cela était vrai.

La mouche bleue parut légèrement gênée, ce qui ne manqua pas d’amuser Maya. Après une pause, elle bondit sur une feuille au-dessus et répondit : « En tant qu’abeille, tu devrais être en train de travailler, non ? Mais si tu veux te reposer, ça me va. Je vais attendre ici un moment. »

« Il y a beaucoup de feuilles, n’est-ce pas ? » remarqua Maya innocemment.

« Elles sont toutes louées, » rétorqua la mouche bleue d’un ton fataliste. « De nos jours, on est déjà bien heureux de de posséder une parcelle de terrain. Si mon prédécesseur n’avait pas été mangé par une grenouille il y a deux jours, je serais encore à la rue. Ce n’est pas facile de chercher un nouvel endroit chaque soir. Tout le monde n’a pas une vie aussi organisée que toi. Mais où sont mes manières ? Je m’appelle Jack Christopher. »

Maya resta silencieuse un moment, l’esprit obsédé par l’idée de tomber dans les griffes d’une grenouille. « Quelle horreur ! » pensa-t-elle, frissonnant à l’idée d’une telle fin.

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« Y a-t-il beaucoup de grenouilles dans le lac ? » demanda Maya d’une petite voix curieuse. Elle s’avança doucement vers le centre de la feuille, espérant échapper aux regards perçants qui pourraient surgir de l’eau sombre en dessous.

La mouche bleue éclata de rire. « Une grenouille peut te voir depuis l’eau si le soleil brille, car la feuille devient transparente. Elle te voit parfaitement assise là-dessus. »

Ces mots firent tressauter Maya. Elle ne se sentait plus à l’aise sur la feuille. Juste au moment où elle s’apprêtait à s’envoler, Jack Christopher fut attrapé par une grande libellule aux ailes flamboyantes.

Sans réfléchir, Maya cria avec courage : « Relâche cette mouche bleue tout de suite ! Tu n’as pas le droit de manger quelqu’un comme ça ! »

La libellule se tourna lentement vers Maya, ses yeux brillants fixés sur elle. Sa taille impressionnante fit trembler la petite abeille comme une brindille dans le vent. Mais la libellule, à la grande surprise de Maya, répondit d’une voix douce et amicale : « Pourquoi t’agites-tu ainsi, petite abeille ? Que veux-tu me dire ? » 

« S’il vous plaît, laissez-le partir », implora Maya, ayant les larmes aux yeux. « Il s’appelle Jack Christopher. »
La libellule sourit et demanda doucement : « Pourquoi devrais-je, petite abeille ? »
Maya balbutia, sa voix tremblant d’émotion : « Oh, c’est un gentil monsieur, si charmant, et il ne t’a jamais fait de mal…à ma connaissance. »
La libellule braqua les yeux sur Jack Christopher. Après un instant de réflexion, elle répondit : « Oui, tu as raison, c’est un gentil petit bonhomme. » 

Puis, en une fraction de seconde, PLOUF ! Jack Christopher disparut dans la gueule béante de la libellule.

Maya resta figée, incapable de prononcer un mot. Elle écoutait, pétrifiée, le bruit sec et effrayant de la libellule croquant sa proie. Ses antennes frémissaient d’horreur au moment où elle fixait la scène, incrédule, son cœur battant à tout rompre. 

« Ne sois pas si sentimentale, petite abeille », déclara la libellule d’un ton tranchant. « Ton émotion ne m’impressionne pas. Vous, les abeilles, n’êtes pas meilleures. Pourquoi es-tu ici ? Il est clair que tu es encore bien jeune et que tu ne comprends pas grand-chose à la vie. Dans la nature, chacun a sa place et sa tâche. Tu as encore beaucoup à apprendre. Alors, cesse de me faire la leçon. » 

Maya, bien que tremblante, s’écria avec audace : « Ne t’approche pas, ou je n’hésiterai point à utiliser mon dard ! »

La libellule s’arrêta net, ses grands yeux étincelants fixant Maya avec un regard perçant. Elle parla alors lentement, d’un ton grave et menaçant : « Les libellules et les abeilles ont toujours coexisté en paix. Elles ne se menacent pas mutuellement. Ne brise pas cet équilibre. »

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« Eh bien, cela semble très avisé », admit Maya en hochant la tête.

La libellule, satisfaite, déploya ses ailes de cristal, se préparant à s’envoler. La lumière du soleil jouait sur la surface du lac, faisant briller ses ailes d’un éclat magique. Maya, émerveillée, oublia momentanément sa peur et même son ami Jack Christopher.

« Comme c’est beau ! » s’exclama-t-elle avec enthousiasme.

La libellule, surprise par le compliment, tourna légèrement la tête vers Maya. « Tu parles de moi ? » demanda-t-elle avec une pointe de coquetterie, avant d’ajouter rapidement : « Oui, je sais que j’ai l’air fantastique. Récemment, des gens au bord de la rivière m’ont admirée et ont parlé de ma beauté. »

« Des gens ? » s’écria Maya, ses antennes frémissant de curiosité. « Tu as vu des humains ? » 

« Bien sûr que oui », répondit la libellule. « Mais ne veux-tu pas d’abord connaître mon nom ? Je m’appelle Chérie D’amour. »

« Oh, parle-moi des gens ! » l’interrompit Maya avec impatience. « Est-ce que les humains ont aussi des dards comme nous ? »

« Oh non, certainement pas », dit Chérie D’amour en se posant gracieusement sur la feuille près de Maya. « Les humains ont de pires armes contre nous, bien plus redoutables. Ils sont terriblement dangereux. Il n’y a pas une créature qui n’ait peur d’eux. »

Maya, captivée, demanda avec enthousiasme : « Est-ce qu’ils essaient de t’attraper ? » 

« Oui, tu ne comprends pas pourquoi ? » demanda Mlle Chérie D’amour, jetant un coup d’œil pensif à ses ailes scintillantes. « J’ai rarement rencontré un humain qui n’ait pas essayé de m’attraper. » 

« Mais pourquoi ? » demanda Maya, ses antennes frémissant d’inquiétude.

« Eh bien, tu vois », répondit Mlle Chérie D’amour avec un sourire modeste et un regard en coin, « il y a quelque chose d’attirant chez nous, les libellules. C’est la seule raison que je connaisse. »

« Pour vous manger ? » demanda Maya.

« Non, je ne crois pas », dit la libellule en secouant la tête. « Pour autant que je sache, les humains ne mangent pas les libellules. C’est plutôt un jeu pour eux, un sport cruel. Les humains sont assoiffés de sang. Ils le font pour s’amuser. Mais je vois sur ton visage que tu ne me crois pas. »

« Bien sûr que j’en doute », répondit Maya avec indignation.

Mlle Chérie D’amour haussa doucement ses épaules scintillantes. « Laisse-moi te raconter une histoire affolante. Mon frère était un jeune et beau libellule promis à un avenir radieux. Mais un jour, un enfant l’a attrapé. Il l’a enfermé dans un bocal, en fermant hermétiquement le couvercle. Mon pauvre frère a rapidement manqué d’air au point de mourir. C’est une fin tragique, n’est-ce pas ? » Une larme scintillante glissa sur la joue de la libellule. « Je me souviens de lui tous les jours sans arrêt. »

« Terrible, » murmura Maya, un frisson parcourant son petit corps doré. Elle se sentait désemparée devant cette histoire si mélancolique.

« As-tu déjà été triste dans ta vie, Maya ? » demanda doucement Mlle Chérie D’amour.

« Non », répondit Maya, après une courte réflexion. « En vérité, j’ai toujours été heureuse jusqu’à maintenant. »

« Alors sois reconnaissante envers le ciel pour cela », dit la libellule. « Mais maintenant, je dois partir. Si tu le souhaites, je te raconterai davantage une autre fois. Au revoir, Maya ! »

Avec ces mots, Mlle Chérie D’amour déploya ses ailes éclatantes et s’envola avec grâce. Maya resta un instant immobile, écoutant la douce chanson que chantait la libellule alors qu’elle disparaissait dans le ciel bleu.

Inspirée par ce départ, Maya pensa qu’il était temps de s’envoler à son tour et souleva ses propres ailes pour continuer son chemin.


Chapitre 4: Maya L’abeille Rencontre Effie et Bobbie

Maya s’était endormie paisiblement dans la couronne d’une grande fleur bleue. Ce matin-là, un léger tapotement la réveilla doucement. Des gouttes de pluie glissaient sur les pétales brillants. C’était la toute première fois que Maya voyait la pluie. Elle observa avec émerveillement les perles d’eau scintillantes. Mais elle se rappela soudain les avertissements de Mlle Cassandra : la pluie est belle, mais dangereuse pour une abeille.

Avec des ailes mouillées, il est presque impossible de voler. Et les gouttes froides peuvent glacer le corps fragile des petites butineuses. Curieuse et prudente, Maya glissa doucement sa tête à travers les pétales pour jeter un œil à l’agitation sur l’herbe mouillée.

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Petit à petit, ses pensées se tournèrent vers la ruche. Une douce nostalgie l’envahit alors qu’elle se rappelait la chaleur et la protection de son foyer. Avec la pluie qui tombait, elle savait que les abeilles de la colonie seraient au repos. La reine, majestueuse et sereine, passerait sûrement d’alvéole en alvéole, saluant ses sujets et pondant de nouveaux œufs. Maya sentit une pointe de solitude se glisser en elle, tandis que l’humidité commençait à lui refroidir les ailes.

« J’espère que cette pluie ne durera pas longtemps, murmura-t-elle. Cette fleur, aussi charmante soit-elle, n’a guère de nectar à offrir. » 

En regardant les gouttes d’eau scintiller sur les pétales, elle réalisa l’importance du soleil dans la vie d’une aventurière. « Sans le soleil, qui aurait le courage de partir explorer le vaste monde ? » pensa-t-elle. Elle se sentit fière d’avoir eu le courage de commencer sa vie toute seule. Tant d’aventures déjà vécues, bien plus que la plupart des abeilles en auraient en une vie entière. « L’expérience, se dit-elle, est le plus grand trésor dans la vie. Elle vaut tous les sacrifices. » 

Alors qu’elle méditait sur ces pensées, une troupe de fourmis passa. Elles avançaient en rangs serrés, chantonnant une mélodie joyeuse. Soudain, un pissenlit se balança violemment, repoussé par un gros scarabée bleu.

Il ressemblait à une demi-sphère de métal sombre parsemée de reflets bleus, verts et parfois noirs qui scintillaient ici et là. Sa carapace, épaisse et luisante, semblait inébranlable. Le chant joyeux des fourmis soldats, qui résonnait à travers les herbes, avait apparemment interrompu son sommeil. Fronçant ses antennes d’un air furieux, le scarabée émit un grondement puissant. 

« Écartez-vous ! J’arrive ! Laissez passer ! » tonna-t-il d’une voix profonde, qui fit trembler les brins d’herbe autour de lui.

Il pensait sans doute que les fourmis, disciplinées et respectueuses des rangs, feraient un pas de côté pour lui céder le passage. « Heureusement, je ne suis pas sur son chemin », pensa Maya, et elle se recroquevilla un peu plus profondément à l’abri de la cloche de la fleur. 

Le scarabée avançait d’un pas lourd, balançant son corps massif d’un côté à l’autre dans l’herbe humide. Quand il arriva sous la fleur de Maya, il s’immobilisa brusquement. À ses pieds, une feuille flétrie reposait sur le sol détrempé. Avec un mouvement brusque et décidé, il la repoussa de ses pattes avant. En dessous, Maya aperçut un trou dans la terre. Elle ne bougea pas d’un pouce. Le seul écho était le doux clapotis de la pluie.

Le monde semblait suspendu dans un calme singulier, seulement troublé par le doux tambourinement des gouttes de pluie.

C’est alors qu’elle entendit le scarabée crier dans le trou : « Si tu veux m’épouser, tu dois te décider maintenant à sortir. Il fait déjà jour ! » 

Un silence suivi d’un long instant s’installa avant qu’une réponse ne se fasse entendre. Puis une voix fine, presque gazouillante, s’éleva depuis les profondeurs du trou : 

« Pour l’amour du ciel, ferme donc la porte là-haut. Il pleut et tout tombe ici dedans ! »

Le scarabée obéit néanmoins en replaçant la feuille flétrie pour couvrir l’entrée du trou. Il se redressa ensuite, adoptant une posture d’attente, la tête inclinée sur le côté, ses yeux rivés sur l’ouverture avec impatience. 

« Dépêche-toi, je n’ai pas toute la journée », marmonna-t-il d’un ton bourru.

Finalement, un insecte brun émergea lentement du trou. Son corps potelé se balançait maladroitement sur des pattes d’une finesse surprenante. Sa démarche était lourde et traînante, et sa tête, massive et étrangement épaisse. Ce qui frappait le plus étaient ses doigts courts et droits. 

« Bonjour, chère Effie », dit le scarabée d’une voix doucereuse. « As-tu bien dormi, ma chérie ? » 

« Je ne pars pas avec toi, Bobbie », répondit-elle d’un ton ferme. « Les gens parlent de nous. » 

« Je ne comprends pas », balbutia-t-il, un mélange de surprise et de désarroi dans la voix. « Faut-il que notre bonheur tout neuf soit détruit par de telles absurdités ? Effie, réfléchis un peu. Qu’est-ce que cela peut bien te faire, ce que disent les humains ? Tu as ton trou, n’est-ce pas ? Tu peux t’y glisser quand bon te semble. Et si tu t’enfonces suffisamment profondément, tu n’entendras plus les ragots et les murmures qui circulent ici, à la surface. »

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« Bobbie, tu ne comprends pas. J’ai mes propres idées à ce sujet », dit Effie d’une voix tranchante. « En plus, tu as profité de mon ignorance. Tu m’as laissé croire que tu étais un scarabée rose, mais hier, un escargot m’a dit que tu es en réalité un scarabée bousier. Et ça, c’est tout à fait différent, n’est-ce pas ? »

Bobbie resta sans voix, abasourdi. Lorsqu’il se remit du choc, il éclata avec indignation : « Non, je ne comprends pas ! Je ne peux pas comprendre ! L’amour, c’est quelque chose que l’on ressent l’un pour l’autre, peu importe qui l’on est, n’est-ce pas ? »

Effie haussa les épaules avec une froideur apparente. « Eh bien, c’est important pour moi », répondit-elle calmement. « Si tu es une créature qui aime se rouler dans le fumier, alors je dois te dire qu’un tel comportement ne me convient pas. Alors, au revoir ! »

Et, d’un mouvement vif… POUF… Effie disparut dans son trou comme emportée par un souffle de vent. Maya, qui observait la scène depuis la sécurité de sa fleur, vit Bobbie rester figé, ses antennes affaissées, ses yeux fixant l’ouverture sombre avec un mélange d’étonnement et de désespoir.

« Les gens n’apprécient plus la force de caractère, et le respect des uns et des autres est difficile à trouver », soupira Bobbie avec tristesse. « Je ne peux pas l’admettre, mais elle n’a absolument pas de cœur. Pourtant, même si elle manque de bons sentiments pour moi, elle devrait être assez sage pour m’épouser et devenir ma femme. »

En voyant les larmes rouler doucement sur le visage du scarabée, Maya sentit son cœur se serrer de pitié.

« Bonté divine », pensa-t-elle avec un frisson d’émotion, « il y a vraiment beaucoup de chagrin dans le monde. »

Mais soudain, son regard se posa sur une scène étrange : le scarabée mordait un morceau de ver et le mangeait tranquillement, tandis que l’autre moitié du ver continuait à se tortiller frénétiquement.

« C’est incroyablement étrange », se dit Maya, fascinée et un peu horrifiée. Elle sentit l’envie irrésistible d’en savoir plus et appela d’une voix claire :

« Bonjour ! »

Le scarabée sursauta, visiblement pris au dépourvu. « Qui est là ? » grogna-t-il en cherchant autour de lui. « Pousse-toi ! »

Maya éclata de rire. « Mais je ne suis pas sur ton chemin », dit-elle en se penchant légèrement depuis la corolle de la fleur.

« Où es-tu alors ? Je ne te vois pas », rétorqua le scarabée, l’air confus.

« Je suis là-haut, dans la fleur bleue », répondit Maya.

« D’accord, mais pourquoi m’appelles-tu ? » demanda-t-il, intrigué.

Maya pointa l’antenne vers le ver qui s’éloignait toujours. « L’autre moitié du ver est en train de s’enfuir », expliqua-t-elle, perplexe.

« Oui, ce sont des créatures très vivantes », dit Bobbie calmement. « Mais je n’ai plus d’appétit. »

Il jeta négligemment le morceau de ver qu’il avait mordu, et même cette partie s’anima immédiatement, s’échappant dans une direction opposée à celle de sa moitié restante.

Maya, abasourdie, ne savait plus quoi penser, tandis que Bobbie, imperturbable, semblait tout à fait habitué à cette bizarrerie du monde des insectes.

« Ne croyez pas que je mange toujours des vers », déclara le scarabée en regardant Maya d’un air grave. « Je préfère les roses, mais elles ne poussent pas partout. »

« Dis à ce petit morceau de ver dans quelle direction son autre moitié est allée ! » s’écria Maya avec enthousiasme.

Bobbie secoua lentement la tête, comme un sage méditant une grande vérité. « Ceux que le destin sépare ne sont jamais réunis », dit-il d’un ton solennel. Puis, levant les yeux vers la petite abeille nichée dans la fleur bleue, il demanda : « Et toi, qui es-tu ? »

« Maya, du monde des abeilles », répondit-elle fièrement.

Le scarabée sembla satisfait. « Je suis heureux de l’entendre », dit-il en hochant la tête. « Je n’ai rien contre les abeilles. Mais pourquoi es-tu assise là ? D’habitude, les abeilles ne restent jamais immobiles bien longtemps. Tu es là depuis longtemps ? » 

« J’ai dormi ici », dit Maya.

« J’espère que tu as bien dormi », dit Bobbie, l’air fâché. « Tu viens de te réveiller ? »

« Oui », dit Maya, qui avait intelligemment deviné que Bobbie n’apprécierait pas qu’elle écoute sa conversation avec Effie le grillon.

« Je suis Bobbie, de la famille des scarabées roses », dit le scarabée.

Maya se mit à rire, car elle savait très bien que ce n’était pas un scarabée rose, mais un bousier. Mais elle ne dit rien, car elle ne veut pas le blesser.

« La pluie ne te dérange pas ? demanda-t-elle.

« Non, je suis habitué à la pluie, grâce aux roses, tu sais. Là où les roses poussent, il pleut généralement. »

Maya se dit : « Maintenant, il faut vraiment qu’il arrête avec tous ces mensonges. Je ne le laisserai plus me tromper. » 

« Bobbie, dit-elle avec un sourire malicieux, c’est quoi ce trou sous la feuille ?

« Un trou ? Un trou, dis-tu ? Il y a beaucoup de trous ici. Ce n’est probablement qu’un trou. Tu n’as pas idée du nombre de trous qu’il y a dans le sol ».

Bobbie avait à peine fini de parler qu’une chose terrible se produisit. En essayant de faire comme si cela ne le dérangeait pas, il perdit l’équilibre et tomba à la renverse. Maya entendit un cri de désespoir et l’instant d’après, elle vit le scarabée couché sur le dos dans l’herbe. Ses bras et ses jambes s’agitaient dans les airs.

« Oh bonté divine ! grince le scarabée. « Je ne pourrai plus jamais me tenir sur mes jambes. Je vais mourir. Je vais mourir dans cette position. As-tu déjà entendu parler d’un pire destin ? »

Et Bobbie continuait à essayer de toucher le sol avec ses pieds. Mais à chaque fois qu’il parvenait à saisir difficilement un peu de terre, il retombait sur sa haute demi-sphère de dos. La situation semblait vraiment désespérée. Maya commença à s’inquiéter sérieusement. Il devenait très pâle et ses cris étaient déchirants.

« Attendez ! cria-t-elle. « Je vais essayer de te retourner. Si j’essaie très fort, je suis sûre que j’y arriverai. Mais il faut que tu arrêtes de crier et que tu m’écoutes. Si je plie un brin d’herbe vers l’avant et que j’en ramène le bout vers toi, peux-tu t’en servir pour te mettre dans la bonne position ?

La petite Maya s’envola donc, malgré la pluie, de son emplacement protecteur dans la fleur jusqu’à un mince brin d’herbe vert à côté de Bobbie et s’y accrocha par l’extrémité. Le brin plia sous son poids et s’enfonça juste au-dessus des membres frétillants de Bobbie.

« Accrochez-vous à lui », cria-t-elle. 

Bobbie s’accrocha fermement au brin d’herbe, ses mouvements maladroits mais déterminés. D’abord une main, puis l’autre, et finalement l’aide de ses pattes robustes lui permirent de grimper petit à petit jusqu’à atteindre une section plus épaisse et stable. Là, il se stabilisa, soufflant profondément de soulagement.

« Dieu merci ! » s’exclama-t-il. « C’était terrible ! »

Maya, qui observait avec curiosité, demanda gentiment : « Tu te sens mieux maintenant ? »

Bobbie hocha la tête en s’appuyant sur le brin d’herbe. Il posa son front sur ses bras comme pour se remettre de ses émotions. « Merci, Maya. Merci beaucoup. Quand je n’aurai plus de vertiges, je te dirai tout ce que je sais sur moi. »

Mais Maya n’entendit rien de plus. Un mulot vint sautiller dans l’herbe à la recherche d’insectes. Maya se cacha et resta immobile sur le sol jusqu’à ce que l’oiseau soit parti. Lorsqu’elle chercha Bobbie, il n’était plus là. Elle décida alors de continuer son chemin, car la pluie avait cessé et la journée était claire et chaude.


Chapitre 5: Maya l’Abeille Et L’Acrobate

Maya s’était installée bien au chaud dans un trou d’arbre. C’était un endroit sûr et sec. Pour se protéger des créatures méchantes, elle avait scellé une partie de l’entrée avec de la cire d’abeille. Elle avait aussi rangé du miel précieux, pour ne pas avoir faim pendant les jours de pluie.

Maya de bij

Aujourd’hui, le ciel était clair et l’air sec. Maya pouvait enfin s’envoler.

« Aujourd’hui, je vais rencontrer un humain ! » s’écria-t-elle, toute joyeuse. « Par une journée pareille, ils doivent sûrement être dehors pour profiter de la nature. »

Maya n’avait jamais vu autant d’insectes réunis en une seule journée. Ils allaient et venaient sans arrêt, remplissant l’air d’un joyeux bourdonnement. Dans l’herbe, Maya aperçut des trèfles. Curieuse et assoiffée, elle se posa minutieusement pour boire une gorgée de nectar sucré des fleurs. Soudain, au sommet d’une fleur qui se penchait au-dessus d’elle, Maya remarqua une étrange créature verte et maigre. Elle la trouva terrifiante. Paralysée par la peur, elle n’osait plus bouger. La créature avait un front bombé, étrange et luisant, avec de longues antennes fines qui semblaient pousser depuis ses sourcils. Son corps, tout en longueur, était d’un vert éclatant, même ses yeux semblaient briller de cette teinte vive. Ses pattes avant étaient élégantes, presque gracieuses, tandis que ses ailes, discrètes et fragiles, paraissaient inutiles. Mais le plus étrange de tout, c’étaient ses pattes arrière : elles ressemblaient à deux grandes échasses articulées, dépassant bizarrement de son corps. 

« Tu as fini de regarder ? » dit la créature. « N’as-tu jamais vu une sauterelle auparavant ? Ou bien es-tu en train de pondre des œufs en ce moment même ? » 

« Qu’est-ce que tu racontes ? » s’exclama Maya, surprise. « Pondre les œufs ? Cela ne me viendrait même pas à l’esprit ! Même si je le pouvais, je ne le ferais jamais. Dans ce cas, je prendrais la place de la reine, et elle est la seule à pouvoir le faire et à en avoir le droit ! »

La sauterelle baissa la tête et fit une grimace si drôle que Maya ne put s’empêcher de rire.  

« Madame, vous êtes vraiment un drôle de personnage ! » dit la sauterelle en riant à son tour.  

« Pourquoi ris-tu ? » demanda Maya avec curiosité. « Tu ne penses quand même pas que je vais pondre des œufs ici, dans l’herbe ? »  

La sauterelle dit alors « Hopla ! » et d’un bond, elle disparut. Puis elle revint vers Maya avec un autre « Hopla ! ». La sauterelle la regarda de haut en bas, de tous les côtés, de l’avant et de l’arrière.  

« Non, tu ne peux pas pondre d’œufs. Tu n’es pas équipée pour cela. Tu es une guêpe, n’est-ce pas ? »  

Se faire traiter de guêpe ! Maya trouva cela profondément insultant. « Comment oses-tu m’appeler guêpe ? » s’écria-t-elle, colère dans la voix.   

« Hopla ! » dit la sauterelle, et elle disparut à nouveau d’un bond.

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Maya s’envola, offensée. Comment osait-il la traiter de guêpe ? Elle pensait que les guêpes étaient des créatures inutiles, petites et agaçantes. Cela la mettait profondément en colère.  

« Hopla ! » Le revoilà.  

La sauterelle, avec un air amusé, reprit : « Madame, je vous demande pardon si je vous interromps parfois. Mais c’est tout à fait normal que je doive sauter de temps en temps. Je ne peux pas m’en empêcher. De temps en temps, je dois sauter, n’importe où. Vous pouvez sauter aussi ? »  

Il lui sourit d’une oreille à l’autre, et Maya, malgré sa colère, ne put s’empêcher de rire. 

« Qui êtes-vous ? » demanda Maya, curieuse. « J’aimerais le savoir. »

« Eh bien, tout le monde sait qui je suis », répondit la sauterelle.

Elle ne pouvait jamais vraiment dire s’il plaisantait ou s’il était sérieux. 

« Je suis une étrangère dans cette région », répondit-elle gentiment, « sinon je vous connaîtrais certainement. Mais n’oubliez pas que j’appartiens à la famille des abeilles et que je ne suis absolument pas une guêpe. »  

« Mon Dieu », dit la sauterelle, « vous vous ressemblez beaucoup. »  

« Vous n’avez manifestement jamais été à l’école », s’exclama-t-elle. « Regardez bien une guêpe. » 

« Pourquoi le ferais-je ? » répondit la sauterelle. « À quoi bon percevoir des différences qui n’existent que dans l’imagination des humains ? Toi, abeille, tu voles dans les airs, tu piques tout ce que tu rencontres et tu ne peux pas sauter. Il en va de même pour une guêpe. Alors, où est la différence ? »  

« Hopla ! » Et il s’éloigna d’un bond.  

« Mais maintenant, je vais m’envoler », pensa Maya.  

Il était de nouveau là. 

« Madame, » dit la sauterelle, « je voudrais vous inviter à un concours de saut auquel je participerai moi-même, dans le jardin du forestier. »

« Je ne m’intéresse pas aux acrobaties, » dit Maya. « Quelqu’un qui vole a des intérêts plus importants. »

La sauterelle sourit, un sourire que l’on pouvait presque entendre.  

« Ne vous faites pas trop d’illusions, ma chère jeune fille ! » dit-elle. « La plupart des créatures de ce monde peuvent voler, mais seules quelques-unes peuvent sauter. J’ai connu des sauterelles, des membres de ma propre famille, qui pouvaient sauter jusqu’à trois cents fois leur longueur. Trois cents fois leur propre longueur ! Imaginez un peu. Même l’éléphant, le plus grand animal du monde, ne peut pas sauter aussi haut. » 

« Hopla. » Et il disparut à nouveau.

Maya le trouvait étrange, cette sauterelle qui se faisait appeler Flip la sauterelle. Mais pendant la brève conversation qu’elle avait eue avec lui, il lui avait appris beaucoup de choses nouvelles. Même si elle n’était pas d’accord avec ses idées sur les sauts, elle le trouvait très intéressant. Il connaissait le nom de nombreuses créatures différentes. Se demanderait-il aussi leur langue ? Si jamais il revenait, elle lui poserait cette question. Elle lui demanderait également ce qu’il pensait du fait de s’approcher d’un humain ou d’entrer dans la maison d’un humain.  

« Hopla ! » La sauterelle était de nouveau là.  

« Mon Dieu ! D’où viens-tu toujours ? » demanda Maya.  

« Des environs », dit la sauterelle. 

« Mais dites-moi, est-ce que vous sautez dans le monde sans savoir où vous voulez atterrir ? » demanda encore Maya.

« Bien sûr. Et pourquoi pas ? Peux-tu lire l’avenir ? Personne ne peut le faire. Seul le crapaud-arbre sait, mais il ne le dit jamais ! » répondit la sauterelle.

« Les choses que tu sais ! Merveilleux, tout simplement merveilleux ! » s’exclama Maya. « Comprends-tu aussi le langage des humains ? » demanda-t-elle avec curiosité. 

« C’est une question à laquelle il est difficile de répondre, Maya, car il n’a pas été prouvé que les humains possèdent un langage. Ils émettent des sons et semblent se comprendre. Une fois, j’ai entendu deux garçons souffler dans un brin d’herbe. Le résultat était un sifflement que l’on pourrait comparer au chant d’un grillon, même si la qualité du son était bien moindre. Apparemment, les humains font une tentative honnête », a répondu la sauterelle.

Et une fois de plus, la sauterelle s’envola. Mais cette fois, Maya l’attendit en vain. Elle regarda autour d’elle dans l’herbe et les fleurs. Elle ne l’aperçut nulle part.


Chapitre 6: Maya L’Abeille Et La Mouche Puck

Dans un coin enchanté du jardin, Maya, fatiguée par la chaleur douce de l’après-midi, s’envola paisiblement vers l’ombre fraîche d’un grand marronnier. Sous ses branches, des tables et des chaises semblaient attendre un festin magique. Plus loin, une maison aux tuiles rouges brillait tendrement sous le soleil, tandis que de minces filets de fumée bleue s’échappaient de ses cheminées, serpentant vers le ciel.

« Est-ce ici le royaume des humains ? » se demanda Maya, émerveillée. Cet arbre majestueux devait leur appartenir, tout comme cette étrange maison en bois qui ressemblait à une ruche mystérieuse.

Soudain, un bourdonnement léger attira son attention. Une petite mouche, agile et curieuse, se posa sur une feuille tout près d’elle. Elle trottinait de haut en bas, comme un minuscule danseur impatient. Ses pattes, invisibles à l’œil nu, semblaient frôler la feuille avec une énergie joyeuse. Puis, d’un bond, elle s’élança vers une autre feuille, si rapide qu’on aurait dit qu’elle sautillait plutôt qu’elle volait.

La petite mouche cherchait sans doute l’endroit parfait pour se poser. Parfois, sans raison, elle s’envolait avec un bourdonnement si puissant qu’on aurait cru qu’un sort l’avait effrayée. Mais aussitôt, elle retombait, comme si de rien n’était, et recommençait ses étranges explorations. Enfin, après bien des aventures, elle se posa, immobile comme une statue, dans un calme surprenant, laissant Maya songeuse devant ce petit spectacle magique.

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En observant les cabrioles de la petite mouche, Maya s’approcha lentement et lui adressa un sourire poli.

« Bonjour, et bienvenue sur ma feuille. Tu es une mouche, n’est-ce pas ? » Demanda-t-elle.

La mouche répondit : « Pour quoi d’autre me prends-tu ? Je suis Puck, et je suis très occupé. Veux-tu me chasser ? »

Maya secoua la tête. « Pourquoi ferais-je une telle chose ? Pas du tout. Je suis enchantée de faire ta connaissance, Puck. »

Puck fit un petit bond, battit des ailes, puis dit simplement : « Je te crois. » Sans un mot de plus, il commença à faire un geste étrange, tirant et tirant comme s’il essayait de détacher sa propre tête.

 « Par tous les pétales de la prairie, que fais-tu ? » s’écria-t-elle.

Puck s’arrêta brusquement dans son étrange manœuvre, puis, avec un calme inattendu, déclara : « Je dois le faire. Tu ne peux pas comprendre. C’est une chose que seules les mouches connaissent, et toi, petite abeille, tu ne sais rien de tout cela. »

Avec une élégance étrange, il glissa ses pattes sur ses ailes jusqu’à enrouler celles-ci autour de son corps. « Et d’ailleurs, je ne suis pas qu’une simple mouche », ajouta-t-il, bombant fièrement son minuscule torse. « Je suis une mouche domestique. J’ai traversé ce jardin pour respirer un peu d’air frais. »

Maya, fascinée, battit des ailes avec enthousiasme. « Quelle aventure extraordinaire ! Alors, tu dois tout savoir sur les humains ! »

Puck ricana en penchant la tête, une lueur moqueuse dans ses yeux brillants. « Aussi bien que je connais les poches de mon pantalon, » dit-il avec malice. « Je m’assois sur des humains tous les jours. Ne le savais-tu pas ? Je pensais que les abeilles étaient censées être intelligentes. Mais peut-être que vous ne faites que le prétendre. »

La petite Maya rougit légèrement, déconcertée par le ton arrogant de son nouvel ami. « Je… je m’appelle Maya », dit-elle timidement. Elle ne comprenait pas d’où les autres insectes tiraient une telle assurance, cette audace qu’elle, pourtant courageuse, ne possédait pas.

« Merci pour l’information. Peu importe ton nom, tu es vraiment un imbécile », dit-il avec un air important. « Il faut toujours être prudent et réfléchi. C’est la chose la plus importante. »

Mais pendant ce temps, une colère brûlante montait en Maya. L’insulte de Puck était de trop ! Elle n’en pouvait plus. Sans trop réfléchir, elle bondit sur lui, attrapa son col et le serra de toutes ses forces.

« Je vais t’apprendre à être poli avec une Abeille ! » cria-t-elle d’une voix forte.

Puck, pris de panique, se mit à pleurer. « Oh non, ne me pique pas, je t’en supplie ! » sanglota-t-il. « C’est la seule chose que tu puisses faire, mais c’est mortel ! Laisse-moi partir, je t’en supplie. Je ferai tout ce que tu voudras ! C’était juste une blague, tu ne comprends pas une blague ? Tout le monde sait que les abeilles sont les insectes les plus respectés, les plus puissants et les plus nombreux. Mais ne me tue pas, pitié ! Si tu me tues, il n’y aura personne pour me ramener à la vie. Mon Dieu, personne n’apprécie jamais mon humour ! »

Maya le regarda sévèrement et dit : « Très bien, je te laisse vivre, mais à une condition. Tu dois me dire tout ce que tu sais sur les humains. »

« Bien sûr, avec plaisir ! » s’exclama Puck en hochant frénétiquement la tête. « Je te l’aurais dit de toute façon. Mais, s’il te plaît, lâche-moi d’abord ! »

Maya relâcha Puck, mais elle n’avait plus aucun respect pour lui. Comment pouvait-elle faire confiance à une créature aussi insignifiante ? Que pouvait-il savoir des humains, lui ? Maya décida qu’elle devrait découvrir par elle-même tout ce qu’il y avait à savoir sur ces êtres mystérieux. Pourtant, cette rencontre n’avait pas été inutile.

Puck, bien que grognon, s’était calmé. Il marmonna en redressant ses antennes tordues, ses ailes froissées, et les petits poils noirs de son corps, tous ébouriffés à cause de la force avec laquelle Maya l’avait attrapé.

« Tout mon corps est en désordre », grommela-t-il d’une voix plaintive. « C’est à cause de ta manière brutale de faire les choses ! Mais bon, dis-moi ce que tu veux savoir sur les humains. Je pense que le mieux serait de te raconter quelques histoires de ma vie. Tu verras, j’ai grandi parmi les humains. Tu apprendras tout ce que tu veux savoir. »

Maya ouvrit de grands yeux. « Tu as grandi au milieu des humains ? » demanda-t-elle, intriguée.

« Bien sûr ! » répondit Puck. « C’est dans un coin de leur chambre que ma mère a pondu l’œuf dont je suis sorti. J’ai appris à marcher sur leur parasol et j’ai fait mes premiers essais de vol en allant de Schiller à Goethe. »

Maya pencha la tête, curieuse. « Qu’est-ce que Schiller et Goethe ? » demanda-t-elle.

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« Ce sont des statues, » expliqua Puck d’un ton très important. « Elles représentent deux hommes qui, paraît-il, étaient très spéciaux. Mais personne ne les regarde vraiment. Elles sont placées sous un miroir, une à gauche et l’autre à droite. »

Maya cligna des yeux. « Qu’est-ce qu’un miroir ? Et pourquoi les statues sont-elles sous un miroir ? » demanda-t-elle.

Puck gonfla sa petite poitrine noire, ravi de partager son savoir. « Pour une mouche comme moi, un miroir sert à voir mon ventre quand je rampe dessus. C’est très drôle, tu sais. Les humains, eux, se comportent étrangement devant un miroir. Ils se touchent les cheveux ou tirent leur barbe. Quand ils sont seuls, ils sourient, mais si quelqu’un les regarde, ils prennent un air sérieux. Je ne comprends pas pourquoi ils font ça. C’est un drôle de jeu inutile à mes yeux. Quand j’étais plus jeune, j’avais beaucoup de mal avec les miroirs. Je pensais pouvoir voler à l’intérieur, mais à chaque fois, je me cognais et j’étais repoussé en arrière. »

Maya écoutait attentivement, mais elle avait encore des questions. Alors, elle posa à Puck d’autres interrogations sur le miroir, auxquelles il eut beaucoup de mal à répondre.

« Écoute, » dit-il enfin, « as-tu déjà volé au-dessus d’un lac ou d’une rivière bien calme ? Un miroir, c’est pareil : une surface lisse qui brille, mais où tu ne peux pas entrer. »

La petite mouche, voyant que Maya écoutait ses histoires avec des yeux brillants et une grande attention, devint soudain plus gentille et plus polie. Elle semblait ravie d’avoir un auditoire si intéressé. De son côté, Maya, même si elle doutait un peu de tout ce que Puck racontait, regrettait d’avoir pensé du mal de lui lors de leur première rencontre.

Puck continua son récit avec enthousiasme : « Il m’a fallu beaucoup de temps pour comprendre leur langage. Mais maintenant, je sais ce qu’ils veulent dire. Ce n’est pas grand-chose, tu sais. Ils répètent presque toujours la même chose tous les jours. »

Maya fronça ses petits sourcils dorés. « Ça, j’ai du mal à le croire ! » dit-elle. « Les humains ont tant d’idées et de projets ! Cassandra m’a raconté qu’ils construisent des villes si immenses qu’on ne peut pas en faire le tour en une journée. Ils bâtissent des tours si hautes qu’elles touchent presque le vol royal de notre reine. Et ils ont des maisons qui flottent sur l’eau ! »

Elle s’arrêta une seconde, le regard pétillant. « Et tu sais quoi ? Ils ont aussi des maisons qui roulent sur deux fines roues argentées et qui vont plus vite que les oiseaux dans le ciel. »

Puck battit des ailes avec énergie, l’air surpris.

« Minute, minute ! » s’exclama-t-il. « Qui est Cassandra, si je peux me permettre de poser la question ? »

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« Oh, elle était mon enseignante. »

« Enseignante ? » répéta Puck en riant, un rire moqueur. « Sans doute une abeille. Qui d’autre qu’une abeille penserait si bien des humains ? Mademoiselle Cassandra, ou peu importe son nom, ne comprend rien à son histoire. Ces villes, ces tours et toutes ces choses humaines dont vous parlez ne valent rien pour nous. »

Puck zigzagua sur la feuille, ses mouvements rapides et dansants, avant de se redresser en tirant la tête, faisant frissonner Maya de peur.

« Sais-tu comment tu peux savoir si j’ai raison ? » demanda-t-il, en frottant ses mains l’une contre l’autre, comme s’il voulait les tordre. « Compte les humains et les mouches dans une pièce. Tu seras bien étonnée du résultat. »

« Peut-être que tu as raison. Mais ce n’est pas la question. »

« Tu crois vraiment que je suis né cette année ? » demanda soudainement Puck.
« Je ne sais pas, » répondit Maya.

J’ai survécu à un hiver glacial », déclara fièrement Puck, bombant son petit torse. « Mes souvenirs remontent au temps des grandes glaces ! On pourrait dire que j’ai traversé une ère glacière. Et si je suis ici, c’est pour me reposer et reprendre des forces. »

« Peu importe ce que vous êtes, vous êtes certainement une créature pleine d’énergie », observa Maya, intriguée par son étrange compagnon.

« Évidemment ! » s’écria Puck en sautillant joyeusement. « Les mouches sont les plus courageuses de toutes les créatures ! Nous ne fuyons jamais, sauf quand c’est vraiment nécessaire. Et même là, nous revenons toujours. Toujours ! Dis-moi, t’es-tu déjà assise sur un humain ? »

« Non », répondit Maya, jetant un regard méfiant à la mouche agitée. Elle n’était pas sûre de pouvoir lui faire confiance. « Non, cela ne m’intéresse pas de m’asseoir sur des humains. »

« Ah, ma chère enfant, c’est parce que tu ne sais pas ce que c’est. Si tu avais vu le plaisir que j’ai avec l’homme à la maison, tu serais verte de jalousie. Laisse-moi te raconter. Il y a un vieil homme dans ma chambre. Il s’endort souvent sur le canapé et commence à faire des bruits bizarres. Pour moi, c’est le signe que je dois descendre. Je m’envole et je m’assois sur le front de l’homme endormi. Le front se situe entre le nez et les cheveux et sert à penser. On peut le voir aux longues rides qui s’étendent de gauche à droite. Elles doivent bouger lorsque quelque chose d’important doit sortir de sa tête. Le front indique également si une personne est irritée. Mais alors les plis se déplacent de haut en bas et un creux rond se forme au-dessus du nez. Dès que je m’assois sur sa ride de la pensée et que je commence à aller et venir dans les rides, l’homme tend les mains en l’air. Il pense que je suis quelque part dans l’air. C’est parce que je suis assis sur sa ride de réflexion et qu’il ne peut pas déterminer rapidement où je me trouve réellement. Finalement, il commence à marmonner et à me frapper. Eh bien, Mlle Maya, ou quel que soit votre nom, vous devez faire preuve d’intelligence. Je vois la main arriver, mais j’attends le dernier moment, puis je m’écarte habilement, je m’assois et je vois ce qu’il fait ensuite. Nous jouions souvent pendant une bonne demi-heure. Vous n’avez pas idée de l’endurance de cet homme. Enfin, il se lève et lance une série de mots montrant à quel point il est ingrat. Mais une âme noble comme la mienne ne cherche pas à être récompensée. À ce moment-là, je suis déjà assis au plafond et j’écoute sa crise d’ingratitude. »

« Je ne peux pas dire que j’aime beaucoup ça », remarque Maya. « N’est-ce pas plutôt inutile ? »

« Tu veux que je lui mette un nid d’abeilles sur le nez ? » s’exclama Puck. « Tu n’as aucun sens de l’humour, ma chère. Que fais-tu d’utile ? »

La petite Maya devint aussi rouge qu’une rose, mais elle se ressaisit vite pour cacher son embarras à Puck.

« Bientôt viendra le jour, » dit-elle doucement, « où je ferai quelque chose de grand et de beau, mais aussi de bon et d’utile. Mais d’abord, je veux découvrir ce qui se passe dans le vaste monde. Dans mon cœur, je sens que ce moment approche. »

Tandis qu’elle parlait, un flot d’espoir et d’enthousiasme réchauffa tout son petit être. Ses ailes frémirent légèrement, comme si elles partageaient son émotion.

Mais Puck, toujours agité, ne sembla pas comprendre la gravité de ses paroles. Il zigzagua de façon désordonnée, ses mouvements rapides et pleins de malice, avant de demander d’un ton léger :
« Aurais-tu, par hasard, un peu de miel avec toi, ma chère ? »

« Je suis désolée », répondit Maya avec gentillesse. « J’aimerais beaucoup t’en donner, surtout après le plaisir que tu m’as offert avec tes histoires. Mais je n’ai pas de miel sur moi. Puis-je te poser une dernière question ? »

« Demande ce que tu veux », dit Puck en bombant le torse. « Je répondrai, toujours, toujours ! »

Maya le regarda avec curiosité. « J’aimerais savoir comment entrer dans la maison d’un humain. »

« Voler à l’intérieur ! » répondit Puck avec intelligence.

« Mais comment faire, sans se mettre en danger ? » demanda Maya d’un ton inquiet.

« Attends qu’une fenêtre soit ouverte », répondit Puck avec sérieux. « Et assure-toi de bien retrouver le chemin pour sortir. Si tu te retrouves enfermée à l’intérieur et que tu ne vois pas la fenêtre, vole toujours vers la lumière. Dans chaque maison, il y a de nombreuses fenêtres. Cherche simplement les endroits où le soleil brille. »

Il la regarda attentivement avant de demander : « Tu pars déjà ? »

« Oui, je pars », répondit Maya en tendant poliment sa patte. « J’ai des choses à faire. Je dois m’occuper de certaines tâches importantes. J’espère que tu te remettras bien des effets de l’ère glaciaire. »

Avec un bourdonnement léger et déterminé, mais teinté d’une petite inquiétude, Maya ouvrit ses ailes brillantes comme des joyaux et s’envola vers le ciel. Elle prit la direction des prairies ensoleillées, prête à cueillir de la nourriture parmi les fleurs éclatantes et parfumées.


Chapitre 7: Maya L’Abeille Se Met En Difficulté

Après avoir rencontré Puck la mouche, Maya était un peu triste. Elle ne pouvait pas croire que tout ce qu’il disait sur les humains soit vrai. Elle avait une image beaucoup plus belle et plus agréable des humains dans sa tête. Elle ne voulait pas que cette image soit changée en croyant à toutes ces idées ridicules sur l’humanité. Elle les voyait comme gentils et attentionnés, et elle préférait garder cette jolie vision dans son esprit. Mais tout de même, un peu d’inquiétude s’empara d’elle.  Comment pouvait-elle savoir si la personne aimerait qu’elle vienne ? Mais elle ferait attention pour ne déranger personne. Elle se souvint des conseils de Cassandra

« Les humains sont gentils et sages », disait Cassandra. Ils sont forts et puissants, mais ils n’abusent jamais de leur pouvoir pour faire du mal. Partout où ils vont, ils apportent de l’ordre et du bien. Nous, les abeilles, savons qu’ils sont gentils avec nous, alors nous partageons notre miel avec eux. Ils nous en laissent assez pour l’hiver, nous protègent du froid et des animaux méchants. Peu d’animaux sont devenus de bons amis avec les humains comme nous. Certains insectes disent du mal des humains. Mais il ne faut pas les écouter. Si une ruche essaie de vivre sans les humains, elle risque de disparaître rapidement. D’autres animaux aiment trop notre miel, et souvent, ils détruisent toute la ruche juste pour en manger. »

C’est ce que Cassandra avait dit à Maya au sujet des humains, et tant que Maya n’aurait pas changé d’avis, elle voulait garder cette belle croyance en eux. 

C’était l’après-midi. Le soleil se couchait derrière les arbres fruitiers du grand du grand jardin que Maya traversait. Les arbres avaient cessé de fleurir depuis longtemps, mais la petite abeille se souvenait encore des milliers de fleurs brillantes qui avaient orné le jardin. Le parfum doux, la lumière éclatante et les couleurs chatoyantes – oh, elle n’oublierait jamais cette beauté magique. Tandis qu’elle volait, elle pensait que tout cela reviendrait au printemps, et son cœur battait de bonheur à l’idée de voler dans un monde aussi merveilleux. Au bout du jardin, le jasmin fleurit abondamment, ses fleurs formant de grandes grappes parfumées. Elles étaient d’un jaune éclatant, avec une couronne blanche comme la neige. Maya se laissait porter par la douce brise et se régalait de leur parfum délicieux.

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Elle volait entre les tiges des mûriers, qui portaient à la fois des baies vertes et des fleurs délicates. Mais soudain, lorsqu’elle décolla à nouveau pour voler plus loin, quelque chose d’étrange tomba sur son front et ses épaules. En un instant, cela recouvrit ses ailes. C’était une sensation étrange et inquiétante, comme si ses ailes étaient soudainement figées, comme si quelque chose la retenait dans son vol. Elle se sentit freinée, et avant même de comprendre, elle tomba, toute désorientée, sur le sol.

Une force invisible et malveillante semblait retenir ses palpeurs, ses jambes et ses ailes. Mais Maya ne tombe pas. Bien qu’elle ne puisse plus bouger ses ailes, elle resta suspendue dans les airs, flottant doucement. Elle montait un peu, puis descendait un peu, puis était projetée dans une direction, puis dans l’autre. C’était comme si elle était une feuille emportée par le vent. Maya était confuse, mais elle n’était pas encore vraiment effrayée. Pourquoi l’aurait-elle été ? Elle ne ressentait ni douleur ni gêne, seulement une étrange sensation, si étrange qu’un frisson d’inquiétude se glissait derrière ses pensées. Mais elle savait qu’elle devait continuer à voler. Si elle se concentrait bien, elle pourrait sûrement s’en sortir.

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Mais maintenant, Maya aperçut un fil élastique et argenté au-dessus de sa poitrine, plus fin que la soie la plus délicate. Un frisson glacé parcourut son dos, et elle se hâta de l’attraper. Mais à peine toucha-t-elle le fil qu’il se colla à sa main, et elle ne put le détacher. Un autre fil argenté était suspendu à ses épaules. Ce fil passait au-dessus de ses ailes et les liait ensemble, rendant ses ailes totalement impuissantes. Et là, et là ! Partout autour d’elle, dans l’air, au-dessus et en dessous de son corps, il y avait ces fils étranges, scintillants et collants ! Maya poussa un cri de terreur.

Maintenant, elle comprend ! Oh, maintenant elle comprend ! Elle était coincée dans une toile d’araignée.

Ses cris terrifiés résonnaient dans l’air paisible de l’été, où le soleil faisait briller le vert des feuilles comme de l’or, où les insectes bourdonnaient de fleur en fleur et où les oiseaux volaient joyeusement d’un arbre à l’autre. Tout près, le jasmin, qu’elle avait tant désiré atteindre, exhalait son parfum sucré, embaumant l’air. Mais maintenant, tout était fini. Un petit papillon bleu clair, aux ailes parsemées de taches brunes brillantes comme du cuivre, vola en passant près d’elle.

« Oh, pauvre petite âme ! » s’écria le papillon en entendant les cris de Maya et en voyant son désespoir. « Que ta fin soit douce, chère enfant. Je ne peux pas t’aider. Peut-être, même ce soir, je connaîtrai le même sort. Mais pour l’instant, la vie est encore belle pour moi. Adieu ! Souviens-toi de penser au soleil pendant ton sommeil éternel. » Et le papillon bleu s’envola joyeusement, savourant la chaleur du soleil, les fleurs colorées et la douce joie de vivre.

Les larmes coulaient des yeux de Maya, et son cœur se serrait de terreur. Elle balança son corps prisonnier d’avant en arrière, bourdonnant aussi fort qu’elle le pouvait et criant à l’aide. Mais plus elle se débattait, plus elle s’enfonçait dans la toile. Dans cette grande détresse, les paroles de Cassandra lui revinrent en mémoire : 

« Fais attention à l’araignée et à sa toile. Si nous, les abeilles, tombons dans sa toile, nous mourrons de manière terrible. L’araignée est méchante et maline, et une fois qu’elle a quelqu’un dans sa toile, elle ne le laisse jamais partir. »

Dans sa terreur, Maya fit un dernier effort désespéré pour se libérer. Et quelque part, un des longs fils se brisa. Maya le sentit se rompre, mais en même temps, elle ressentit la toile d’araignée qui l’entourait encore, de plus en plus oppressante. C’est ainsi que fonctionne une toile d’araignée : plus on s’agite, plus elle devient forte et dangereuse. Alors, épuisée, Maya abandonne. C’est alors qu’elle aperçut l’araignée elle-même, tout près, cachée sous une feuille de mûrier. En voyant ce grand monstre, immobile et silencieux, prêt à frapper, l’horreur de Maya grandit encore. Les yeux malveillants et brillants observaient la petite abeille, avec une froide patience.

Maya poussa un cri de terreur. C’était le pire des pires. La mort elle-même ne pouvait pas être plus effrayante que ce monstre gris et poilu, avec ses crocs acérés et ses pattes menaçantes sous son gros corps. L’araignée allait fondre sur elle, et tout serait fini. Mais soudain, une colère profonde monta en elle, plus forte que jamais. Elle oublia sa peur de la mort et se concentra sur une seule chose : vendre sa vie aussi cher que possible. Elle poussa un cri de guerre puissant, clair et perçant, un cri que toutes les créatures reconnaissaient et redoutaient.

“Tu vas payer ta ruse par la mort », cria-t-elle à l’araignée. « Viens essayer de me tuer, vas-y, tu découvriras bientôt ce que peut faire une Abeille.”

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L’araignée ne broncha pas. Elle avait effrayé de plus grandes créatures que la petite Maya. Forte de sa colère, Maya fit une nouvelle tentative violente et désespérée pour se libérer et… l’un des longs fils suspendus au-dessus d’elle se rompit. La toile était probablement destinée aux mouches et aux moustiques, pas à des insectes aussi gros que les abeilles. Mais Maya ne fit que s’empêtrer davantage dans la toile. D’un seul mouvement de glissement, l’araignée s’approcha de Maya. Elle balança ses pattes agiles sur un seul fil et resta suspendue, le corps droit vers le bas.

« Qu’est-ce qui te donne le droit de briser ma toile ? » grogna l’araignée en fixant Maya de ses yeux. « Que fais-tu ici ? Le monde n’est-il pas assez grand pour toi ? Pourquoi viens-tu déranger une paisible recluse comme moi ? »

Ce que Maya venait d’entendre n’était certainement pas ce qu’elle espérait.

« Ce n’était pas mon intention ! » s’écria-t-elle, mais avec une pointe d’espoir dans la voix. Aussi effrayante que soit l’araignée, elle ne semblait pas vouloir lui faire de mal. « Je n’ai pas vu ta toile et je m’y suis coincée. Je suis vraiment désolée. Est-ce que tu pourrais m’aider à sortir ? »

L’araignée s’approcha doucement. « Tu as un drôle de petit corps », dit-elle en relâchant délicatement un fil de sa patte. « C’est incroyable qu’un fil aussi fin puisse supporter une créature aussi grande ! »

Maya supplia : « Oh, s’il te plaît, aide-moi à me libérer. Je te serai tellement reconnaissante ! »

L’araignée sourit, mais son sourire semblait étrange et un peu effrayant. « C’est pour ça que je suis là », dit-elle d’un ton calme. « Mais arrête de bouger, tu es en train de détruire toute ma toile. Reste tranquille et je vais te libérer. »

« Merci ! Merci beaucoup ! » s’écria Maya avec soulagement.

L’araignée était maintenant tout près d’elle. Elle observa attentivement la toile pour comprendre comment Maya s’y était coincée.

« Et ton dard ? » demanda-t-elle soudain.

Maya sentit un frisson lui parcourir le corps. L’araignée avait vraiment l’air méchante avec ses yeux perçants et son sourire rusé. Mais Maya prit son courage à deux mains et répondit poliment : « Ne t’inquiète pas pour mon dard. Je vais le plier pour que personne ne puisse se blesser. »

L’araignée hocha la tête. « J’espère bien », dit-elle avec un air méfiant. « Maintenant, reste immobile. Sinon, tu vas abîmer encore plus ma toile. »

Maya resta silencieuse. Tout à coup, elle sentit quelque chose la secouer d’avant en arrière, comme si elle était prise dans une tempête. Elle avait le vertige et commençait à se sentir malade. Elle ferma les yeux un instant, mais la curiosité la poussa à les rouvrir.

À sa grande horreur, elle se rendit compte qu’elle était maintenant complètement enveloppée dans un fil collant et brillant. L’araignée avait travaillé vite et silencieusement pour la piéger davantage.

« Oh non ! » murmura Maya, sa voix tremblante de peur. Elle comprit qu’elle s’était fait avoir. L’araignée avait été rusée et elle, trop naïve. Maya ne pouvait plus bouger, ni ses ailes, ni ses pattes. Elle se sentait totalement impuissante.

Une profonde tristesse envahit son cœur. « Est-ce vraiment la fin ? » pensa-t-elle. « Je n’aurais jamais imaginé qu’il y avait autant de méchanceté dans le monde. »

Les larmes aux yeux, elle pensa à tout ce qu’elle aimait. « Adieu, cher soleil qui brille si fort. Adieu, mes chères sœurs abeilles. Pourquoi vous ai-je quittées ? J’espère que vous vivrez heureuses. »

Pendant ce temps, l’araignée l’observait, un peu à l’écart. Malgré sa ruse, elle restait méfiante, surveillant le dard de Maya.

« Eh bien, alors ? » dit l’araignée d’un ton moqueur. « Comment ça va maintenant, petite fille ? »

Maya était trop fière pour répondre à la créature perfide. Elle resta silencieuse, jusqu’à ce qu’elle sente qu’elle n’en pouvait plus. Alors, d’une voix tremblante, elle murmura : « S’il vous plaît, tuez-moi maintenant. »

« Vraiment ! » s’exclama l’araignée tout en réparant quelques fils déchirés. « Tu crois que je suis assez stupide pour faire une chose pareille ? Tu mourras de toute façon, si tu restes assez longtemps. C’est à ce moment-là, quand tu ne pourras plus me piquer, que je te sucerai le sang. Et si tu voyais à quel point tu as ruiné ma toile, tu comprendrais à quel point tu mérites de mourir. »

Elle se laissa tomber au sol avec agilité, attacha l’extrémité d’un fil fraîchement tissé à une petite pierre, puis remonta rapidement. Une fois en haut, elle attrapa le fil auquel Maya était emprisonnée et commença à tirer sa captive sans effort.

« Je vais te mettre à l’ombre, ma chère, pour que tu ne te dessèches pas au soleil, » dit-elle d’un ton sarcastique. « En plus, suspendue ici, tu ressembles à un épouvantail. Tu feras peur à ces mortels insouciants qui ne font pas attention où ils vont. Parfois, ce sont les moineaux qui viennent saccager ma toile. »

Elle s’arrêta un instant, fixant Maya avec un sourire tordu. « Oh, au fait, je m’appelle Thekla, et je suis de la famille des araignées croisées. Inutile de me dire ton nom, cela ne m’intéresse pas. Tu es une belle et grosse abeille, et je suis certaine que tu seras délicieusement tendre et juteuse. »

La petite Maya était suspendue à l’ombre du mûrier, tout près du sol, entièrement à la merci de la cruelle araignée qui comptait la laisser mourir lentement de faim. La tête penchée vers le bas dans une position désespérante, elle sentit rapidement ses forces l’abandonner. Elle gémit faiblement, et son appel à l’aide s’éteignit peu à peu. Qui pourrait bien l’entendre ? Sa colonie d’abeilles ignorait tout de son malheur et ne pouvait lui venir en aide.

Soudain, un grognement retentit dans l’herbe. Une voix forte s’éleva : « Poussez-vous ! J’arrive. »Le cœur de Maya bondit. Elle reconnut aussitôt la voix de Bobbie, le bousier.

« Bobbie ! » appela-t-elle aussi fort qu’elle le put. « Bobbie, mon cher Bobbie ! »

« Pousse-toi ! J’arrive », répondit Bobbie.

« Mais je ne suis pas sur ton chemin, Bobbie ! » cria Maya. « Je suis suspendue au-dessus de ta tête. L’araignée m’a attrapée ! »

« Qui es-tu ? » demanda Bobbie. « Beaucoup de gens me connaissent. Tu le sais, n’est-ce pas ? »

« C’est moi, Maya – Maya, l’abeille. Oh, je t’en supplie, aide-moi ! »

« Maya ? Maya ? Ah, maintenant je me souviens. Nous nous sommes rencontrés il y a quelques semaines. Tu n’as pas l’air dans ton assiette, si je puis dire. Tu as vraiment besoin de mon aide. Comme il se trouve que j’ai un peu de temps, je ne vais pas te la refuser. »

« Oh, Bobbie, peux-tu déchirer ces fils ? »

« Déchirer ? Ces fils ? Ne m’insultez pas. » Bobbie fléchit ses bras musclés avec fierté. « Regardez ces muscles, durs comme de l’acier. Je peux faire bien plus que casser quelques toiles d’araignée. Tu vas voir. »

Bobbie se hissa sur la feuille, agrippa fermement le fil auquel Maya était suspendue, puis se laissa tomber en tirant de toutes ses forces. Le fil céda, et Maya, ainsi que Bobbie, tombèrent doucement au sol.

« Ce n’est qu’un début », déclara Bobbie en secouant ses épaules. « Mais Maya, tu trembles. Ma chère enfant, pourquoi avoir si peur de la mort ? Tu dois apprendre à la regarder calmement dans les yeux, comme moi. Maintenant, laisse-moi te libérer. »

Maya, trop émue pour parler, sentit des larmes de joie couler sur ses joues. Elle allait retrouver sa liberté ! Elle pourrait de nouveau voler au soleil, se déplacer où elle voudrait, vivre !

Bobbie se mit au travail, détachant les fils collants un à un. Soudain, Maya leva les yeux et vit l’araignée descendre rapidement le long du buisson de mûres.

« Bobbie, cria-t-elle, l’araignée arrive ! »

Bobbie, imperturbable, continua son travail tout en riant doucement. C’était un insecte d’une force et d’un courage peu communs.

« Elle y réfléchira à deux fois avant de s’approcher », dit Bobbie d’une voix assurée.

Mais soudain, une voix aiguë et méchante retentit au-dessus d’eux : « Voleurs ! À l’aide ! On me vole ! Espèce de gros tas, espèce de gros lard, que faites-vous avec ma proie ? »

Bobbie leva calmement la tête et répondit avec un ton posé : « Ne vous inquiétez pas, madame. Mais je vous avertis, si vous prononcez encore un mot qui me déplaît, je mettrai toute votre toile en lambeaux. Maintenant, pourquoi es-tu si calme tout à coup ? »

L’araignée répondit avec un soupir vaincu : « Je suis vaincue. »

« Très bien. Dans ce cas, tu ferais mieux de partir maintenant », répliqua Bobbie sans lui accorder davantage d’attention.

L’araignée lança un regard empli de haine et de venin à Bobbie. Cependant, lorsqu’elle jeta un œil à sa toile déchirée, elle se ravisa. Lentement, en colère, elle s’éloigna, jurant et grommelant tout bas sur l’injustice du monde. Elle alla se cacher dans une feuille flétrie, d’où elle pouvait observer et surveiller sa toile en silence.

Pendant ce temps, Bobbie s’appliquait à libérer Maya. Il déchira soigneusement les fils qui enserraient ses jambes et ses ailes. Le reste, Maya pouvait le faire elle-même. Lorsqu’elle fut enfin libre, une joie immense l’envahit.

Elle était toutefois encore affaiblie par le choc et avançait lentement, ses mouvements précautionneux montrant de sa fragilité. Mais son cœur débordait de gratitude et de bonheur.

« Il faut juste que tu oublies ce que tu as vécu », dit Bobbie d’un ton rassurant. « Alors tu arrêteras de trembler. Maintenant, vois si tu peux voler. Essaie. »

Maya s’éleva dans les airs avec un léger bourdonnement. Ses ailes fonctionnaient parfaitement, et, à son immense soulagement, elle constata qu’aucune partie de son corps n’avait été blessée. Elle vola lentement jusqu’à un bouquet de fleurs de jasmin, où elle but avidement la sève au parfum délicieusement sucré. Revigorée, elle revint auprès de Bobbie, qui s’était éloigné des buissons de mûres et se reposait tranquillement dans l’herbe.

« Je te remercie de tout mon cœur et de toute mon âme », dit Maya, profondément émue et submergée par la joie de sa liberté retrouvée.

« Un mot de remerciement, c’est la moindre des choses », répondit Bobbie avec un petit sourire satisfait. « Mais que veux-tu ? C’est dans ma nature. Je fais toujours quelque chose pour les autres. Maintenant, envole-toi vite. Et, un conseil : couche-toi tôt ce soir. Tu as encore beaucoup de chemin à parcourir ? »

« Non, répondit Maya, je n’ai pas besoin d’aller loin. J’habite à la lisière de la forêt de hêtres. »

Elle marqua une pause, regardant Bobbie avec gratitude, puis ajouta avec une chaleur sincère dans la voix : « Au revoir, Bobbie. Je ne t’oublierai jamais, jamais, jamais, tant que je vivrai. Au revoir ! »


Chapitre 8: Maya L’Abeille Et Le Papillon

L’aventure de Maya avec l’araignée la fit réfléchir. Elle se promit d’être plus sage à l’avenir, de ne plus agir aussi vite et sans réfléchir. Les conseils de Cassandra sur les dangers qui guettaient les abeilles ne devaient pas être pris à la légère. Le monde était vaste, et de nombreuses découvertes l’attendaient. Il y avait tant à voir et à explorer pour une petite abeille.

Le soir, lorsque la nuit tombait et que Maya se retrouvait seule, elle pensait à tout cela. Mais au matin, quand le soleil brillait dans le ciel, ses inquiétudes s’évanouissaient. Son désir de nouvelles aventures la poussait à plonger dans la joie de la vie.

Un jour, Maya fit la rencontre d’une créature bien étrange. Elle était plate comme une crêpe et avait des angles comme une étoile. Sa carapace était soignée, mais on ne savait pas si elle avait des ailes. L’étrange créature était toute tranquille sur une feuille ombragée de framboisier, les yeux à moitié fermés, semblant perdue dans ses pensées. L’air était parfumé du doux arôme des framboises. Maya était curieuse. Elle voulait savoir qui était cet être mystérieux.

Elle vola délicatement vers la feuille voisine et lui demanda : « Comment vas-tu ? » Mais la créature resta silencieuse.

Maya insista : « Alors, comment vas-tu ? » Elle tapota la feuille doucement. L’étrange créature ouvrit un œil, le fixa sur Maya et dit : « Une abeille. Le monde est plein d’abeilles. » Puis, elle referma son œil et resta là, calme comme avant.

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« Quelle étrange créature ! » pensa Maya, toute curieuse. Elle était bien décidée à découvrir le secret de cet être mystérieux. Cela lui donnait encore plus envie d’en savoir plus ! Alors, elle eut une idée. « J’ai beaucoup de miel », dit-elle joyeusement. « Puis-je t’en offrir ? »

L’inconnu ouvrit un œil, le fixa un moment, pensif. Maya attendait avec impatience : « Que va-t-il dire cette fois-ci ? » se demanda-t-elle.

Mais cette fois, il n’y eut aucune réponse. L’œil se ferma lentement et la créature resta là, toute calme, collée contre la feuille. On ne voyait même pas ses jambes. On aurait presque cru qu’elle avait été écrasée comme une petite mouche sous un pouce. Maya comprit alors que l’étrange créature voulait l’ignorer. Mais, vous savez, la petite abeille n’aime pas être ignorée ou repoussée, surtout quand elle n’a pas encore découvert ce qu’elle veut savoir.

« Qui que tu sois, » dit Maya d’une voix déterminée, « je sais que les insectes aiment se saluer, surtout quand l’un d’eux est une Abeille. » Mais l’insecte resta immobile, sans ouvrir son œil.

« Il doit être malade, » pensa Maya, toute peinée. « Quel dommage d’être malade par un si beau jour ! C’est pour ça qu’il reste à l’ombre. » Alors, elle vola jusqu’à la feuille et se posa à côté de lui. « Est-ce que tu ne te sens pas bien ? » demanda-t-elle, aussi gentiment que possible.

À ce moment-là, la drôle de créature commença à se déplacer. ” se déplacer ” est le mot juste, car elle ne marchait pas, ne courait pas, ne volait pas, ne sautait même pas.

« Elle n’a pas de jambes. C’est pour ça qu’elle est si en colère, » pensa Maya, tout étonnée.  

Quand la créature arriva à la tige de la feuille, elle s’arrêta un instant, puis continua son chemin. Et, à la grande surprise de Maya, elle aperçut une petite goutte brune laissée sur la feuille.  

« C’est bien étrange, » se dit-elle. Mais, avant même de réfléchir, Maya plaça vite sa main devant son nez et la pressa fermement. Une odeur nauséabonde monta de la petite goutte brune. Maya était sur le point de s’évanouir. Elle s’échappa en un éclair et se posa sur une framboise, toujours en se tenantle nez, tremblant de dégoût et d’émotion.  

« Pourquoi toucher une punaise puante ? » s’écria une voix moqueuse au-dessus d’elle, éclatant de rire.  « Ne riez pas ! » hurla Maya, rouge de honte et de colère.

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Maya leva les yeux. Un joli papillon blanc s’était posé sur une fine branche du framboisier qui se balançait doucement. Il ouvrait et refermait ses grandes ailes avec grâce. Le papillon était tout tranquille, heureux sous les rayons du soleil. Ses ailes étaient décorées de coins noirs et de petites taches rondes noires au centre. Oh, comme il était beau, comme il était beau ! Maya oublia sa colère. Et, surtout, elle était ravie de parler à ce papillon. Elle n’en avait jamais rencontré, bien qu’elle en ait vu voler autour d’elle.

« Oh, » dit-elle, « tu as sûrement raison de rire. C’était une punaise puante ? »  

« C’est bien ce que c’était, » répondit le papillon, toujours en souriant. « C’est le genre de créature qu’il vaut mieux éviter. Tu es sans doute encore jeune, non ? »  

« Eh bien, » dit Maya en réfléchissant, « je ne dirais pas ça exactement. J’ai déjà vécu bien des choses. Mais c’est la première fois que je rencontre une créature comme celle-là. Peux-tu imaginer faire ce que la punaise a fait ? »  

Le papillon éclata de rire.  

« Tu sais, » expliqua-t-il, « les punaises puantes aiment être seules. Elles ne sont pas vraiment populaires, alors elles utilisent cette goutte malodorante pour attirer l’attention. Sans elle, on les oublierait vite. C’est comme un rappel. Et elles veulent qu’on se souvienne d’elles, peu importe comment ! »

Maya parla encore au papillon : « Tes ailes sont magnifiques, vraiment très belles », dit-elle. « Puis-je me présenter ? Je m’appelle Maya, je viens du peuple des abeilles. »  

Le papillon replia ses ailes, et on aurait dit qu’il n’en avait qu’une qui se dressait bien haut dans l’air. Il fit une petite révérence.  

« Fred », dit-il, d’un ton calme.  

Maya regarda le papillon, étonnée.  

« Tu peux voler un peu ? », demanda-t-elle.  

« Je m’envole ? »  

« Oh non, je veux juste voir tes grandes ailes blanches bouger dans le ciel tout bleu. Mais ce n’est pas grave. Je peux attendre. Où est-ce que tu habites ? »  

« Nulle part en particulier. Un endroit fixe, c’est trop embêtant. La vie est devenue vraiment joyeuse quand je me suis transformé en papillon. Avant ça, quand j’étais une chenille, je passais ma journée à manger dans les choux et à me chamailler. »  

« Que veux-tu dire ? » demanda Maya, toute perdue.  

« Avant, j’étais une chenille », expliqua Fred.  

« Ce n’est pas possible ! », s’écria Maya.  

« Si, si », répondit Fred en montrant ses antennes. « Tout le monde sait qu’un papillon commence comme une chenille. Même les humains savent ça. »  

Maya était complètement confuse. Comment ça pouvait être vrai ?  

« Il faut vraiment que tu m’expliques mieux », dit-elle. « Je ne peux pas croire ça sans plus de détails. Tu ne peux pas t’attendre à ça de ma part. »

Le papillon s’assit à côté de la petite abeille sur la branche élancée du framboisier et ils se balancèrent ensemble dans la brise du matin. Pendant ce temps, il lui raconta comment il avait commencé sa vie en tant que chenille et comment, un jour, en perdant sa dernière peau de chenille, il avait émergé sous la forme d’une chrysalide.

« Après quelques semaines, je me suis réveillé de mon sommeil noir et j’ai brisé la coquille de la chrysalide. Je ne peux pas te dire, Maya, quel sentiment t’envahit lorsque tu revois soudain le soleil après une si longue période. J’ai eu l’impression de me fondre dans un océan chaud et doré, et j’ai tellement aimé ma vie que mon cœur s’est mis à battre la chamade. »

« Je comprends tout à fait, dit Maya. « J’ai ressenti la même chose la première fois que j’ai quitté la vie quotidienne de notre cité des abeilles pour m’envoler vers le monde lumineux et parfumé des fleurs. » La petite abeille resta silencieuse pendant un moment, pensant à son premier vol. Puis elle voulut savoir comment les grandes ailes du papillon pouvaient pousser dans le petit espace de la chrysalide.

Fred sourit et expliqua :

« Mes ailes, vois-tu, étaient repliées comme les pétales d’un bouton de fleur. Mais dès que le soleil brille et que l’air devient chaud, la fleur ne peut s’empêcher de s’ouvrir, et ses pétales se déploient. C’est pareil pour mes ailes. Elles étaient repliées, puis le soleil les a fait s’ouvrir. Personne ne peut résister au soleil quand il brille. »

« Non, personne ne peut résister au soleil », pensa Maya. Elle regardait le papillon blanc, si pur et lumineux, assis dans la lumière dorée du matin, avec le ciel bleu en toile de fond.

Fred reprit : « Certains disent parfois que nous, les papillons, sommes frivoles. Mais en vérité, nous sommes simplement heureux. Heureux de voler, heureux de vivre. Ils ne croiraient pas que je réfléchis parfois sérieusement à la vie. »

« À quoi penses-tu ? » demanda Maya avec intérêt.

« Oh, à l’avenir », répondit Fred en riant légèrement. « Penser à l’avenir est fascinant. Mais pour l’instant, ce que je veux vraiment, c’est voler. Les collines sont couvertes de fleurs – des achillées et tant d’autres merveilles ! Tout est en fleurs, et j’aimerais y être, tu sais. »

Maya hocha la tête. Elle comprenait parfaitement ce que ressentait Fred. Alors, ils se dirent au revoir. Fred s’envola doucement, porté par un vent léger, ses ailes blanches se balançant comme une plume.

Quant à Maya, elle s’éloigna aussi, bourdonnant gaiement autour des fleurs. Le son léger de ses ailes résonnait dans l’air chaud, un murmure qu’on entend toujours les jours d’été.


Chapitre 9: Maya L’Abeille Et La Patte Perdue

Dans le creux de l’arbre où Maya avait décidé de passer l’été, vivait une famille de scarabées. Fridolin, le père, était un scarabée assidu qui consacrait toute son énergie à s’occuper de sa grande famille. Il était particulièrement fier de ses cinq fils débordants d’énergie, chacun ayant creusé son propre tunnel sinueux dans le tronc du pin. 

Un matin, comme à son habitude, Fridolin vint saluer Maya avec son sourire accueillant lui demanda si elle avait bien dormi. « Tu ne voles pas aujourd’hui ? » ajouta-t-il.

« Non, il est venteux », répondit-elle en jetant un regard inquiet à travers l’ouverture du creux.

Et en effet, le vent soufflait avec force. Il hurlait à travers les branches, les balançant violemment de haut en bas. Après chaque rafale, le ciel semblait s’éclaircir brièvement, mais les arbres, eux, s’effeuillaient toujours plus.

Même le vieux pin robuste qui abritait Maya et Fridolin gémissait sous la pression des bourrasques. 

Fridolin soupira profondément. « J’ai travaillé dur toute la nuit. Il faut bien faire quelque chose pour arriver à quelque chose. Mais franchement, ce pin ne me plaît pas. Un autre arbre aurait été mieux », confia-t-il à Maya.

Il secoua la tête avec une expression préoccupée. « Ah, la vie serait vraiment adorable s’il n’y avait pas ces maudits pics. »

Maya hocha la tête en signe d’accord. « Oui, c’est vrai. Les pics mangent tous les insectes qu’ils croisent. »

Fridolin répondit : « Si ce n’était que ça, s’ils ne mangeaient que les créatures imprudentes, je pourrais comprendre. Après tout, un pic a aussi besoin de vivre. Mais qu’ils viennent jusqu’aux nos tunnels dans l’arbre, c’est franchement inapproprié. » 

Maya fronça les sourcils. « Mais ils ne peuvent pas faire ça, n’est-ce pas ? Ils sont bien trop grands pour se glisser dans vos tunnels, non ? »

Fridolin regarda Maya avec sériosité, ses antennes frémissant légèrement d’émotion. Il haussa les sourcils, secoua la tête deux ou trois fois. Il semblait penser qu’il était très important parce qu’il savait quelque chose qu’elle ne savait pas. « Sa taille n’a pas d’importance, ma chère Abeille. Ce que nous craignons, c’est sa langue. » 

Maya le regarda avec des yeux écarquillés. Fridolin lui parla de la langue du pic : « Elle est longue, fine, et arrondie comme un ver. Mais le pire, c’est qu’elle est collante et hérissée de petites pointes, comme un fil de fer barbelé. » 

Il continua avec une intensité croissante : « Le pic peut étirer sa langue dix fois ma longueur, imagine ! Il l’enfonce dans chaque fente, chaque crevasse de l’arbre, à la recherche de quelque chose à attraper. C’est ainsi qu’il atteint nos maisons. » 

Maya frissonna. Elle n’était pas facilement impressionnée, mais cette description la fit frémir. « Je ne suis pas facilement effrayée, mais ça… c’est vraiment terrifiant », admit-elle. 

Fridolin la fixa avec une pointe d’envie. « Oh, toi, tu n’as rien à craindre, tu as un dard », dit-il avec un soupir jaloux. « Mais nous, les scarabées, nous n’avons pas cette chance. Nous sommes désarmés face à un ennemi comme ça. »

« Oh, tu n’as pas à avoir peur, tu as un dard », dit Fridolin, un peu jaloux. « Mais c’est différent pour nous, les scarabées. »

Maya écoutait, le cœur serré, repensant à ses propres aventures passées et aux dangers qu’elle pourrait encore rencontrer. Brusquement, elle entendit Fridolin s’esclaffer. Elle leva les yeux, ébahie.

« Regarde donc qui est là ! » s’exclama Fridolin.

Maya tourna la tête et aperçut une créature remarquable qui montait lentement le long du tronc de l’arbre. C’était un être qu’elle n’avait encore jamais vu, étrange et fascinant à la fois. 

« Ne devrions-nous pas nous cacher ? » demanda Maya, un frisson d’inquiétude dans la voix. La peur avait soudainement pris le pas sur sa curiosité.

« Ne sois pas ridicule, Maya. Reste calme et sois polie avec lui. C’est un savant, très cultivé, et il est inoffensif. En plus, il est plutôt drôle ! Regarde un peu ce qu’il fait en ce moment. Il lutte contre le vent », dit Fridolin, hilare, d’un air moqueur. « J’espère seulement qu’il ne finira pas par s’emmêler les jambes ! » 

« Ces longs fils sont vraiment ses jambes ? » demanda Maya, les yeux écarquillés de stupéfaction. « Je n’ai jamais rien vu de tel. »

Entre-temps, Maya pouvait mieux observer l’étrange créature. Son corps minuscule, suspendu sur ces longues pattes filiformes, semblait flotter dans l’air à chaque pas. Avec précaution, l’étranger avançait, sa petite boule brune oscillant légèrement au gré du vent, tandis qu’il s’accrochait à l’écorce de l’arbre.

Maya frappa ses petites mains en signe d’émerveillement. « Eh bien, même dans mes rêves les plus fous, je n’aurais jamais imaginé des jambes aussi délicates. Elles sont aussi fines que des cheveux, et pourtant il peut les utiliser de cette façon. C’est fantastique, Fridolin ! » 

L’étranger les rejoignit. Debout sur ses longues jambes pointues, il baissa ses petits yeux vers Maya. 

« Bonjour, » dit-il d’une voix calme, tout en s’accrochant fermement à l’arbre, « Quel vent ! »

Fridolin se détourna pour cacher son fou rire, tandis que Maya, avec sa gentillesse naturelle, répondit poliment : « Oui, il souffle trop fort aujourd’hui pour voler. » Puis elle se présenta. L’étranger pencha la tête pour la regarder entre ses jambes.

« Maya, du peuple des abeilles, » dit-il avec un sourire discret. « Enchanté. Moi, j’appartiens à la famille des araignées, celles qui possèdent de longues pattes. Je me nomme Hannibal. »

Les araignées avaient toujours eu une mauvaise réputation parmi les petits insectes, et Maya ne pouvait complètement camoufler sa peur en présence de Hannibal. Elle se remémora avec effroi son aventure dans la toile de l’araignée Thekla, mais se rassura en pensant : « Je peux toujours m’envoler. Elle n’a pas d’ailes, et sa toile est ailleur. » 

Hannibal observa Maya un moment, puis demanda : « Si cela ne te gâte pas, je viendrais bien m’asseoir sur ta grosse branche. »

« Bien sûr, » répondit Maya en lui faisant de la place. Elle le regarda avec curiosité tout en réfléchissant : « Il y a une multitude et une diversité d’animaux dans ce monde. Une nouvelle découverte chaque jour. » Tout à coup, ses yeux s’écarquillèrent, et elle s’exclama : « Hannibal, tu as une jambe de plus ! »

L’araignée poussa un léger soupir et répondit d’un ton terne : « Non, petite Maya, tu te trompes. En fait, il me manque une jambe. »

« Pourquoi ? D’habitude, vous, les araignées, vous avez huit pattes, n’est-ce pas ? »

Hannibal hocha la tête. « Oui, nous avons huit pattes, et crois-moi, nous en avons besoin de toutes. Malheureusement, j’ai perdu l’une des miennes, et c’est une vraie perte. Mais je m’en adapte. »

Maya dit le cœur plein de compassion : « Ce doit être terrible de perdre une patte. »

Hannibal plaça son menton dans l’une de ses mains et disposa ses longues jambes élégantes sous lui de manière à ce qu’on ne puisse plus les compter facilement. Après un moment de silence, il reprit : « Je vais te raconter comment c’est arrivé. Et comme c’est souvent le cas, un humain était impliqué. Nous, les araignées, sommes prudentes. Mais les humains, eux, sont terriblement imprudents. »

« Oh, raconte-moi l’histoire, s’il te plaît, » demanda Maya en s’installant plus confortablement sur la branche.

« Écoute, » dit Hannibal, « nous, les araignées, nous chassons la nuit. Je vivais dans un abri de jardin où je pouvais facilement entrer et sortir en rampant. Une nuit, un homme est venu avec une lampe, du papier et de l’encre parce qu’il voulait écrire ses pensées. Il écrivait sur les insectes, mais les humains ne savent pas grand-chose de notre peuple. Ce soir-là, comme d’habitude, j’étais assis sur le rebord de la fenêtre, et l’homme était à la table. Cela m’irritait beaucoup de voir une nuée de petites mouches et de moustiques voler autour de la lampe. Ils auraient été bien mieux dehors, sous les feuilles, où ils auraient été en sécurité et où je pourrais les attraper facilement. Mais non, ils étaient là, fascinés par la lumière. »

Il fit une pause avant de poursuivre, sa voix empreinte d’émotion. « Cette nuit-là, j’ai vu quelques moustiques tomber et mourir sous la lampe. L’homme les avait laissés là. Alors, j’ai décidé d’aller les chercher moi-même. »

Hannibal secoua la tête en soupirant. « Quelle erreur… J’ai rampé sur le pied de la table et avancé prudemment vers la lampe. Mais, alors que je passais près d’une bouteille, l’homme m’a vu. En un instant, il m’a attrapé. »

Maya ouvrit de grands yeux. « Oh non ! Et ensuite ? »

« Il m’a soulevé par une patte, » dit Hannibal, une note de colère dans la voix. « Il me balançait d’avant en arrière, en riant comme si c’était un jeu. J’étais là, suspendu, complètement impuissant. Ses grands yeux me fixaient, et moi, je ne pouvais rien faire d’autre que de me débattre. »

Maya était horrifiée. « Des yeux si grands ? » demanda-t-elle, la voix tremblante.

Hannibal hocha la tête. « Imagine, Maya, ce que cela représentait pour moi. Suspendu par une jambe, face à ces immenses yeux. »

« Terrible ! Vraiment terrible ! »

« Heureusement, ma jambe s’est cassée. Sinon, il se serait passé quelque chose de bien pire. Je suis tombé sur la table et j’ai couru aussi vite que j’ai pu. Il a mis ma jambe, qui bougeait encore, sur une feuille blanche. »

« Ta jambe a-t-elle encore bougé ? » demanda Maya, incrédule.

Hannibal hocha la tête avec un soupir. « Oui, elle a bougé. Nos jambes continuent de bouger, même lorsqu’elles sont arrachées. Ma pauvre jambe a couru, mais comme je n’étais plus là pour la guider, elle ne savait pas où aller. »

Maya ouvrit de grands yeux. « Impossible, » dit-elle. « Une jambe arrachée ne peut plus bouger. »

Hannibal se redressa, visiblement agacé. « Tu es encore trop jeune pour comprendre, Maya, mais c’est vrai. Chez nous, les araignées, nos jambes conservent leur mobilité un moment, même séparées de notre corps. »

Maya fronça les sourcils. « Je ne peux pas le croire sans preuve. »

Cette réponse fit bondir Hannibal de colère. « Tu crois que je vais me couper une autre jambe juste pour te convaincre ? » cria-t-il, sa voix tremblante d’indignation. « C’est une insulte ! Jamais personne n’a osé douter de mes paroles jusqu’à maintenant. »

Maya ne comprenait pas ce qui avait tant contrarié l’araignée, ni quelle terrible chose elle avait faite.

« Ce n’est pas facile de se confronter à des étrangers, » pensa Maya. « Ils ne pensent pas comme nous et ne voient pas que nous ne voulons pas de mal. » Elle regarda piteusement l’araignée en colère qui s’éloignait. 

Hannibal avait manifestement pris sa gentillesse pour de la faiblesse, et cela ne lui plaisait pas. Une nouvelle force monta en elle. Maya, habituellement douce et compréhensive, se redressa soudain avec assurance. Elle leva ses magnifiques ailes transparentes qui captèrent un rayon de soleil, fit entendre un bourdonnement clair et déterminé, et s’exclama avec une étincelle de fierté dans les yeux : « Je suis une abeille, Monsieur Hannibal ! »

Hannibal s’arrêta net et murmura d’une voix confuse : « Je vous demande pardon. » Puis, sans un mot de plus ni un regard en arrière, il tourna les talons et courut promptement sur ses sept jambes le long du tronc d’arbre.

Maya resta un instant immobile, les ailes frémissantes, tandis que le vent s’apaisait autour d’elle. La journée promettait d’être radieuse. Ses pensées se tournèrent vers les prairies ensoleillées et les tapis de fleurs joyeusement colorés qui l’attendaient de l’autre côté du lac. 

D’un battement d’ailes résolu, elle s’élança dans les airs, portée par une brise douce et le parfum de l’aventure. Elle se sentait libre et heureuse d’avoir survivre.


Chapitre 10: Maya L’abeille Et Les Merveilles De La Nuit

Pendant l’été, la petite Maya volait joyeusement et vivait de nombreuses aventures. Pourtant, les autres abeilles et le royaume de la ruche lui manquaient parfois. Elle aspirait à un travail utile, car les abeilles sont des créatures actives, qui trouvent leur bonheur dans l’effort et l’harmonie collective. Mais la petite Maya n’était pas encore prête à vivre dans la ruche pour toujours. Toutes les abeilles ne s’adaptent pas bien à la vie de la colonie, tout comme les humains ne s’intègrent pas toujours facilement dans la société. Il est important de ne pas juger ces individus, mais plutôt de leur offrir une chance de prouver leur valeur. Sous leur apparence différente se cache souvent une aspiration profonde à quelque chose de plus grand, de plus beau que la vie ordinaire.

La petite Maya, avec son esprit pur et sensible, portait un véritable intérêt à tout ce que le monde avait à offrir. Cependant, il est difficile d’être seul, même lorsqu’on est heureux. Plus Maya vivait ses aventures seule, plus elle ressentait le besoin d’avoir quelqu’un à ses côtés. Elle avait grandi depuis qu’elle avait quitté la ruche. De petite abeille inexpérimentée, elle était devenue une belle créature, dotée d’ailes puissantes et d’un dard acéré. Et elle était une vraie aventurière. 

Maya voulait faire quelque chose de tout ce qu’elle avait appris en chemin. Parfois, elle voulait retourner à la ruche et demander pardon à la reine. Mais son désir de connaître les humains était plus grand. Selon elle, personne n’était plus intelligent ni plus puissant que les humains. 

Un jour, tout en voletant joyeusement au-dessus des prairies ensoleillées, elle aperçut une jeune fille endormie parmi les fleurs sauvages. Elle s’arrêta, intriguée, et l’observa avec étonnement. La jeune humaine semblait paisible, presque irréelle dans la lumière douce de l’après-midi. Maya la trouva immédiatement gentille et attachante. Tout ce qu’elle avait entendu de terrible sur les humains s’effaça de sa mémoire.

Alors qu’elle contemplait cette scène, un moustique s’approchait. En la voyant, il la salua d’un signe d’aile.

« Regarde cette fille là-bas », s’exclama Maya avec enthousiasme. « Regarde comme elle est belle et bonne ! » 

Le moustique, surpris, tourna lentement la tête vers l’humaine endormie, puis regarda Maya avec un sourire malicieux.
« Oui, c’est une bonne humaine », répondit-il calmement. « D’ailleurs, je viens de la goûter. Je l’ai piquée », expliqua-t-il avec une pointe de fierté. « Regarde, mon corps est tout rempli de son sang. »

Maya recula d’un battement d’ailes, choquée.

« Tu l’as piquée ? » s’écria-t-elle. « Va-t-elle mourir ? Où l’as-tu blessée ? Comment as-tu pu faire une chose pareille ? Tu es un prédateur ! » 

Le moustique éclata d’un petit rire méprisant. 

« Mourir ? Bien sûr que non », répondit-il. « Ce n’est qu’une petite piqûre. Elle ne s’en rendra même pas compte. Votre ignorance est vraiment incroyable. Penses-tu vraiment que les humains sont de bonnes créatures ? Je n’ai jamais rencontré quelqu’un qui m’ait volontairement donné une goutte de sang. »

« Je ne connais pas grand-chose sur les humains, je suis bien d’accord », dit Maya.

« Mais de tous les insectes, c’est vous, les abeilles, qui avez le plus à faire avec les humains. C’est un fait connu », déclara le moustique.

Maya baissa les yeux, un peu gênée. « J’ai quitté notre royaume », avoua-t-elle timidement. « Je ne l’aimais pas. Je voulais en savoir plus sur le monde extérieur. » 

Le moustique plissa ses petits yeux et battit lentement des ailes, pensif. « Et comment trouves-tu le monde extérieur ? » demanda-t-il finalement. « J’admire ton indépendance. Pour ma part, je n’accepterais jamais de servir les humains. »

Maya redressa soudain la tête, offensée par cette remarque. « Mais les humains nous servent aussi ! » rétorqua-t-elle avec vivacité. Elle ne supportait pas son critique.

« Peut-être… Peut-être… » dit-il. Puis, il ajouta : « À quelle tribu appartiens-tu ? »

« Je viens de la tribu des abeilles du parc du château », répondit Maya.

« J’en ai entendu parler. Je respecte votre royaume. Il paraît qu’il y a eu un récent soulèvement, n’est-ce pas ? » dit le moustique d’un ton faussement sérieux. 

« Oui », répondit Maya avec une pointe de fierté dans la voix. Mais au fond de son âme, elle sentit monter une vague de nostalgie pour son peuple et un désir latent de servir à nouveau la reine. 

Elle évita de poser davantage de questions au moustique sur les humains. À ses yeux, le moustique se comportait de manière effrontée et insouciante.

« Je vais prendre une autre bonne gorgée », s’exclama le moustique avant de s’envoler vers la jeune fille endormie. 

Maya, horrifiée, s’éloigna rapidement. Elle ne pouvait supporter de voir le moustique blesser cette petite humaine endormie. Comment pouvait-il faire cela sans se mettre en danger lui-même ? Cette pensée la troubla profondément. Cassandra, la sage conseillère de la ruche, n’avait-elle pas dit un jour : « Si tu piques un humain, tu mourras ? »

En dépit de cet événement, le désir de Maya d’en apprendre davantage sur les humains ne s’affaiblit pas. Elle se fit alors une promesse solennelle : être plus courageuse et ne jamais abandonner jusqu’à ce qu’elle ait atteint son objectif. Ce qu’elle ignorait, c’est que son souhait de mieux connaître les humains allait se réaliser de manière plus belle et extraordinaire qu’elle ne l’aurait jamais imaginé. 

Par une chaude soirée d’été, Maya se coucha tôt, épuisée par les aventures de la journée. Mais en plein milieu de la nuit, elle se réveilla soudain. Lorsqu’elle ouvrit les yeux, sa chambre était baignée d’une étrange lueur bleutée. La lumière semblait provenir de l’entrée et formait comme un rideau bleu argenté, doux et scintillant.

Maya eut d’abord un frisson de peur à l’idée de regarder au-delà. Pourtant, une sérénité délicieuse emplissait l’air, accompagnée d’un son mélodieux, clair et apaisant. Intriguée, elle se risqua à jeter un coup d’œil à l’extérieur. Le monde entier semblait envoûté. Les arbres et les brins d’herbe étaient recouverts d’un éclat argenté, et un doux voile bleu enveloppait tout.

« Ce doit être la nuit », murmura Maya en repliant ses ailes. 

Elevé dans le ciel, un grandiose disque d’argent brillait paisiblement, répandant une lumière douce sur le monde. D’innombrables petites lumières clignotaient dans le firmament. Maya se rendit compte qu’elle voyait la lune et les étoiles pour la première fois. Elle en avait souvent entendu parler, mais jamais elle n’avait eu l’occasion de les contempler. 

Le son qui l’avait réveillée résonna à nouveau dans le silence magique de la nuit : un gazouillis cristallin et mélodieux, comme une musique céleste. Maya ne pouvait plus rester immobile. La beauté de la nuit la submergea, et elle s’envola dans ce monde argenté, envahie d’une curiosité irrésistible. 

Alors qu’elle flottait dans l’air, elle aperçut une créature ailée posée sur une feuille de hêtre. Ses ailes brillantes semblaient refléter la lumière de la lune, et elle leva la tête vers le ciel tout en émettant le gazouillis argenté qui avait captivé Maya.

« Comme c’est beau… c’est un son venu des cieux », murmura Maya, émerveillée.

En silence, elle vola jusqu’à la feuille et se posa délicatement. Mais à peine avait-elle effleuré la feuille que le gazouillis s’interrompit brusquement. Un silence absolu s’installa, si intense qu’il en devenait presque inquiétant. 

« Bonne nuit », dit poliment Maya. « Je suis désolée de vous interrompre, mais la musique que vous jouez est si belle que je devais découvrir d’où elle venait. »

Le grillon, surpris, tourna la tête vers elle. « Quel genre de créature rampante es-tu ? Je n’ai jamais rencontré quelqu’un comme toi. »

« Je ne suis pas un insecte rampant », répondit Maya avec un sourire. « Je suis Maya, du peuple des abeilles. »

« Oh, du peuple des abeilles ! Vous êtes donc des créatures du jour, n’est-ce pas ? » dit le grillon d’un ton curieux. « J’ai entendu parler de votre race. C’était le hérisson qui me l’a raconté. Il disait qu’il mangeait les abeilles mortes que vos semblables jettent hors de la ruche chaque soir. »

« Oui », répondit Maya, légèrement bouleversée. « J’ai aussi entendu parler du hérisson. Il sort à la tombée de la nuit et se nourrit d’insectes morts. Mais es-tu ami avec cette créature ? Il est si râpeux et affolant. »

Le grillon éclata de rire. « Nous, les grillons des neiges, nous nous entendons très bien avec lui. Oh, bien sûr, il essaie parfois de nous attraper, mais il n’y parvient jamais. Nous aimons beaucoup le taquiner. Cela nous amuse fabuleusement. » 

Maya l’observa avec prudence. « Alors tu es un grillon arboricole ? » demanda-t-elle.

Le grillon se redressa fièrement. « Oui, exactement, un grillon des neiges. Mais je dois te laisser, petite abeille. La nuit est encore jeune, la lune est pleine, et je dois jouer. Une belle nuit comme celle-ci mérite toute ma musique. »

« La nuit de la Saint-Jean est la plus belle de l’année », déclara le grillon d’un ton solennel. « C’est tout ce que je peux vous dire. Écoutez ma musique, et vous comprendrez. »

Sans tarder, le grillon se remit à jouer sa mélodie douce et envoûtante.

La petite abeille, fascinée par cet univers nocturne si différent du sien, s’assit paisiblement dans la lueur bleue de cette nuit d’été. Elle se plongea dans une réflexion profonde sur les mystères de la vie.

Soudain, un silence envahit les lieux, ponctué seulement par le bruissement léger des feuilles. Maya entendit un doux battement d’ailes et aperçut le grillon s’élever gracieusement dans le clair de lune.

« La nuit rend aussi les abeilles mélancoliques », pensa Maya en se levant, son cœur un peu plus lourd. Elle s’élança dans les airs, guidée par l’idée réconfortante de retrouver sa prairie fleurie adorée.

Sur la route, elle fut éblouie par un spectacle inattendu : de majestueux iris bordaient un ruisseau étincelant sous la lumière lunaire. Maya se posa délicatement sur l’un des pétales bleus.

« Où va donc toute cette eau du ruisseau ? » se demanda-t-elle avec curiosité. « Il y a tant de choses que j’ignore sur ce vaste monde… »

Alors qu’elle contemplait le ruisseau, une voix douce et cristalline se fit entendre, brisant le silence avec une mélodie semblable à celle d’une cloche. C’était un son tellement unique que Maya en fut profondément troublée.

« Qu’est-ce que cela peut bien être ? » pensa-t-elle, ses antennes frémissant d’excitation.

Une petite créature, lumineuse comme une étoile, émergea gracieusement de la fleur voisine. Son corps semblait briller, et elle portait une robe blanche d’une pureté éclatante.

La petite créature, leva lentement les bras vers le clair de lune. Son visage s’illumina d’une expression de béatitude pure, rayonnant d’une sérénité presque divine. Puis, avec une grâce inouïe, deux ailes blanches et translucides se déployèrent dans un mouvement fluide.

Maya, immobile, observa cette apparition avec des yeux écarquillés, le souffle coupé. Elle n’avait jamais rien vu d’aussi magnifique et étrange à la fois.

Alors, la petite créature lumineuse commença à chanter. Sa voix cristalline résonnait comme une cascade d’étoiles filantes, évoquant « l’âme des choses ». La mélodie, si douce et si pénétrante, atteignit le cœur de Maya. Submergée par l’émotion, la petite abeille sentit des larmes perler à ses yeux. 

 « Qui pleure ? » demanda la créature lumineuse.

« Ce n’est que moi », dit Maya timidement. « Désolée de t’avoir dérangée. »

« Mais pourquoi pleures-tu ? » demanda la petite créature.

« Peut-être parce que tu es si belle », répondit Maya. « Oh, dis-moi, tu es un ange, n’est-ce pas ? »

La créature sourit gentiment. « Non, je ne suis pas un ange. Je suis un elfe des fleurs », dit-elle. « Mais toi, que fais-tu ici au milieu de la nuit ? » 

Maya se sentit rassurée et commença à lui raconter ses aventures. Elle lui parla des choses qu’elle avait vues, des rencontres qu’elle avait faites, et de son envie d’en apprendre toujours plus. L’elfe écouta attentivement, en hochant parfois la tête avec un sourire.

Quand Maya eut terminé, l’elfe lui caressa tendrement la tête et dit : « Nous, les elfes des fleurs, vivons seulement sept nuits. Mais nous devons rester dans la fleur où nous sommes nés, sinon nous mourons quand le soleil se lève. »

« Oh non ! Vite, retourne dans ta fleur ! » s’écria Maya, effrayée.

L’elfe secoua la tête avec tristesse. « Non, c’est déjà trop tard. Mais ce n’est pas grave. Nous, les elfes des fleurs, sommes heureux de quitter notre fleur, parce qu’un grand bonheur est associé à notre départ. Avant de mourir, nous pouvons réaliser le vœu le plus cher de la première créature que nous rencontrons. Cela rend quelqu’un très heureux. »

Maya trouvait cela incroyable. « C’est merveilleux ! Moi aussi, je quitterais ma fleur si je pouvais faire ça ! » s’écria-t-elle. Mais tout à coup, elle sembla se souvenir de quelque chose.

« Attends… est-ce que ça veut dire que tu vas mourir ? » demanda-t-elle, inquiète.

L’elfe hocha la tête. « Oui, nous vivons jusqu’à l’aube, et quand le soleil se lève, nous disparaissons. Nous sommes emportés par des voiles de soie qui flottent au-dessus de l’herbe et des fleurs. Ces voiles brillent comme s’ils émettaient une lumière blanche. C’est ce que nous devenons : des gouttes de rosée. Et après, Les plantes nous absorbent, et nous faisons partie de leur croissance et de leurs fleurs. Puis, après un certain temps, nous redevenons des elfes des fleurs dans leurs pétales », expliqua l’elfe. 

« Alors tu as été un autre elfe des fleurs avant celui-ci ? » demanda Maya avec curiosité.

L’elfe hocha la tête. « Oui, mais j’ai tout oublié. Quand nous dormons dans la fleur, nous oublions notre vie passée. » 

Maya était émerveillée. « Oh, quel destin incroyable ! » s’exclama-t-elle.

L’elfe sourit doucement. « C’est en fait ainsi pour toutes les créatures de la Terre. »

Maya sentit son cœur se remplir de joie. « C’est merveilleux ! » dit-elle.

L’elfe se pencha vers elle. « Mais dis-moi, n’as-tu pas un souhait ? Je peux réaliser ton vœu le plus cher. »

Maya resta silencieuse un moment. « Moi ? Je ne suis qu’une petite abeille. Non, je ne peux pas te demander quelque chose d’aussi grand. Je ne mérite pas une telle chose. »

L’elfe secoua la tête en riant doucement. « Personne ne “mérite” ce qui est beau ou bon. Les choses belles et bonnes arrivent à tous, comme les rayons du soleil. » 

Le cœur de Maya battait fort. Bien sûr, elle avait un vœu, mais elle n’osait pas le dire à haute voix. L’elfe sembla deviner ses pensées et lui sourit avec bienveillance.

« J’aimerais apprendre à connaître les humains, mais seulement ce qu’ils ont de plus beau et de meilleur en eux », dit timidement la petite abeille.

L’elfe sourit et se leva. Ses yeux brillaient de confiance et de gentillesse. Elle tendit une main légère vers Maya.

« Viens avec moi, petite abeille. Volons ensemble. Ton souhait va se réaliser. » 


Chapitre 11: Maya L’Abeille Vole Avec L’Elfe Des Fleurs

C’est ainsi que Maya et l’elfe des fleurs s’envolèrent ensemble dans la douce lumière d’une nuit d’été. Maya était enchantée de suivre ce bel être lumineux, se sentant en sécurité et pleine d’excitation. Elle avait tant de questions à lui poser, mais n’osait pas encore parler.

Alors qu’elles survolaient une rangée d’arbres, un grand papillon de nuit sombre apparut, volant silencieusement comme une ombre. Il était presque aussi grand qu’un oiseau.

« Attendez, s’il vous plaît », appela l’elfe des fleurs d’une voix douce mais ferme.

Maya fut surprise de voir le papillon de nuit obéir si rapidement. Ils s’installèrent tous les trois sur une branche, surplombant le paysage éclairé par la lune. 

Le papillon de nuit battait ses grandes ailes, créant une brise légère et fraîche. Ses ailes étaient ornées de rayures bleu vif qui scintillaient dans la lumière argentée. Sa tête semblait recouverte de velours, et son visage, mystérieux, ressemblait à un masque avec de grands yeux sombres. Comme ces créatures de la nuit sont merveilleuses ! 

Un frisson glacial parcourut Maya, qui pensait faire le rêve le plus étrange de sa vie.

« Tu es vraiment très belle », dit Maya, très impressionnée, au papillon de nuit.

« Qui est ton compagnon de voyage ? » demanda le papillon de nuit à l’elfe des fleurs, en jetant un regard curieux vers Maya.

« Une abeille. Je l’ai rencontrée juste avant de quitter ma fleur », répondit l’elfe.

Le papillon de nuit sembla comprendre ce que cela signifiait. Il observa Maya attentivement, presque avec un soupçon de jalousie. « Tu as beaucoup de chance », dit-il d’un ton sérieux en secouant la tête d’avant en arrière lentement. 

Maya, pleine de bienveillance, demanda : « Es-tu triste ? »

Le papillon hocha la tête. « Non, je ne suis pas triste », répondit-il. Puis il adressa à Maya un regard si amical qu’elle ressentit aussitôt l’envie de devenir son amie.

L’elfe des fleurs, qui semblait avoir une question importante, s’adressa au papillon : « La chauve-souris est-elle toujours à l’étranger, ou bien est-elle allée se reposer ? » 

Le papillon de nuit réfléchit un instant avant de répondre : « Oh, elle se repose depuis un moment. Tu veux le savoir à cause de ton amie l’abeille, n’est-ce pas ? »

L’elfe acquiesça. Maya, intriguée, se demanda ce qu’était une chauve-souris, mais avant qu’elle ne puisse poser la question, l’elfe des fleurs déclara :

« Viens, Maya, nous devons continuer. La nuit est si courte. »

Le papillon de nuit demanda gentiment : « Puis-je vous porter sur une partie du chemin ? »

L’elfe des fleurs répondit avec douceur : « Une autre fois, peut-être. »

Maya, en silence, pensa : « Cela n’arrivera jamais, car l’elfe des fleurs doit mourir à l’aube. »

Le papillon de nuit se maintint sur sa branche, perdu dans ses pensées. « On m’a toujours dit que j’étais gris et laid », réfléchit-il tristement. « Que mes motifs ne valent pas la splendeur des papillons colorés. Mais cette petite abeille a vu quelque chose de beau en moi ! Et elle m’a demandé si j’étais triste. Non, je ne suis pas triste », décida-t-il finalement, avec une petite étincelle de gaieté. 

En ce temps, Maya et l’elfe des fleurs volaient à travers les buissons du jardin. La fraîcheur de la rosée et la lumière agréable de la lune rendaient tout magique : les fleurs semblaient briller et les arbres dansaient dans l’obscurité. Maya, éblouie, serra la main de l’elfe des fleurs. Elle tourna la tête vers elle et vit une lumière de bonheur briller dans ses yeux. 

« Qui aurait pu imaginer une telle nuit ? » murmura Maya, les ailes frémissantes de joie.

Soudain, quelque chose attira son attention. Elle poussa un petit cri de surprise : « Oh, regardez ! Une étoile est tombée du ciel ! Elle bouge et cherche sa place parmi les autres. »

L’elfe des fleurs regarda dans la direction indiquée par Maya, mais répondit calmement, sans sourire : « Ce n’est pas une étoile, Maya. C’est une luciole. »

Maya comprenait maintenant pourquoi elle aimait tant l’elfe des fleurs : l’elfe ne se moquait jamais d’elle, même lorsqu’elle se trompait.

« Les lucioles sont des créatures très particulières », expliqua l’elfe des fleurs. « Elles portent toujours leur propre petite lampe et éclairent l’obscurité là où la lumière de la lune ne va pas. Tu en apprendras plus sur elles plus tard, quand nous serons parmi les humains. »

« Pourquoi ? » demanda Maya, curieuse.

L’elfe sourit mystérieusement : « Tu le découvriras bientôt. »

Tandis qu’elles descendaient vers le sol, entourées de jasmin et d’abricotiers, elles entendirent un léger bruissement. L’elfe des fleurs leva la main et fit signe à une luciole de s’approcher.

« Pourriez-vous, s’il vous plaît, nous offrir un peu de lumière dans ce feuillage sombre ? » demanda l’elfe avec douceur.

La luciole répondit : « Mais ta lueur est bien plus éclatante que la mienne ! »

« Oh oui, c’est vrai ! » s’exclama Maya avec enthousiasme.

« Je dois m’envelopper dans une feuille », expliqua l’elfe des fleurs. « Sinon, les humains pourraient me voir et avoir peur. Nous, les elfes, n’apparaissons aux gens que dans leurs rêves. »

« Je comprends », répondit la luciole. « Je vais vous aider, mais cette grande créature que vous avez avec vous… elle ne va pas me faire de mal, n’est-ce pas ? »

L’elfe secoua la tête avec un sourire rassurant, et la luciole se détendit.

L’elfe se roula alors dans une feuille, formant un manteau vert qui cachait son éclat. Elle arracha une petite clochette de l’herbe et la posa comme un casque sur sa tête brillante. Seul son visage dépassait légèrement, mais il était si discret que personne ne pourrait le remarquer.

« Maintenant, asseyez-vous sur mon épaule », demanda-t-elle à la luciole, « et baissez un peu votre lumière en cachant un côté avec votre aile. Cela suffira pour que nous avancions discrètement. »

« Viens », dit l’elfe en prenant la main de Maya. « Il vaut mieux que nous montions ici. »

Alors qu’elles grimpaient le long de la vigne, Maya demanda : « Est-ce que les gens rêvent quand ils dorment ? »

« Oui, ils rêvent quand ils dorment, mais parfois aussi quand ils sont éveillés. Leurs rêves sont toujours plus beaux que leur vie », répondit l’elfe.

L’elfe posa alors son doigt sur ses lèvres pour indiquer à Maya de faire silence. Elle écarta une petite branche de jasmin en fleurs et poussa Maya en avant. « Regarde en bas », murmura-t-elle. « Tu vas voir ce que tu as toujours voulu voir. »

Maya regarda en bas et vit deux personnes. Sur un banc, sous la lumière douce de la lune, un garçon et une fille étaient assis. La tête de la fille reposait sur l’épaule du garçon, et il l’entourait de son bras. Ils restaient silencieux, comme si le temps s’était arrêté.

Maya observa la fille, avec ses cheveux dorés et ses lèvres rouges. Elle semblait à la fois un peu triste et très heureuse. Puis la fille se tourna vers le garçon et lui murmura quelque chose à l’oreille. Cela fit apparaître un sourire magique sur son visage.Maya pensa alors : Seuls les humains peuvent ressembler à ça. Elle voyait dans leurs yeux un ravissement si pur qu’elle en fut profondément impressionnée.

« J’ai vu la plus belle chose de ma vie », se dit Maya à voix basse. « Je sais maintenant que les gens sont les plus beaux lorsqu’ils sont amoureux. »

Elle demeura assise, silencieuse, profondément remué par ce qu’elle venait de voir. Elle ne savait pas combien de temps elle était restée là, mais lorsqu’elle se retourna, la lumière de la luciole avait disparu, et le lutin des fleurs n’était plus là non plus. Au loin, Maya les premières aurores du jour se levaient.


Chapitre 12: Maya L’abeille Et Elvis La Coccinelle

Le soleil était déjà haut dans le ciel lorsque Maya ouvrit les yeux dans son refuge au cœur de la forêt. Le clair de lune scintillant, le grillon chantant, la douce nuit d’été, le lutin mystérieux, ainsi que le garçon et la fille dans la tonnelle… tout cela lui semblait appartenir à un rêve enchanteur. Mais non, c’était bien réel. Elle le savait. 

Le soleil brillait, et un concert vibrant d’un millier d’insectes emplissait l’air. Maya observa cette agitation avec un mélange de fierté et de distance. Quelle différence entre ce que ces insectes simples connaissaient et tout ce qu’elle avait vécu au cours de ses aventures ! Ses expériences lui paraissaient uniques et précieuses, mais en regardant autour d’elle, elle se rendit compte que le monde continuait son chemin, indifférent. Les insectes allaient et venaient et les oiseaux et les papillons gambadaient dans la prairie fleurie.

Une vague de tristesse l’envahit soudain. Malgré tout ce qu’elle avait appris et traversé, elle n’avait personne avec qui partager ses joies ou ses peines. Sa solitude lui pesait. 

Plutôt que de rejoindre les autres insectes, elle choisit de s’enfoncer dans la forêt. Sous l’ombre dense des arbres, avec ses sentiers sinueux et ses secrets cachés, elle espérait trouver un endroit qui corresponde mieux à son humeur.

La forêt a ses propres mystères que personne ne soupçonne en marchant sur les sentiers. Il faut écarter les branches du sous-bois et regarder à travers les buissons sur la mousse épaisse. Les secrets de la forêt se trouvent sous les feuilles et dans les trous des troncs d’arbres. On y trouve le bonheur et la tristesse, la joie et le danger.

Maya ne comprenait pas grand-chose à tout cela alors qu’elle volait entre les arbres. Elle passait tantôt à l’ombre fraîche, tantôt sous la lumière éclatante du soleil qui faisait briller les fougères et les mûres. Après un moment, elle sortit de la forêt et découvrit un vaste champ de céréales baigné de soleil. Elle se posa sur une branche de bouleau à la lisière du champ et resta immobile, le souffle coupé, devant cette mer d’or. Le grain, caressé par le vent, ondulait doucement, comme s’il dansait sous le ciel bleu.

Sous le bouleau, quelques petits papillons bruns voltigeaient gaiement, jouant avec des feuilles tombées au sol. Maya les observa silencieusement un instant. 

« Cela doit être très amusant », pensa-t-elle, « les enfants de la ruche pourraient aussi jouer comme ça. Mais Cassandra ne le permettrait pas, elle est toujours si sévère. »

Maintenant qu’elle pensait à la maison, Maya se sentait à nouveau triste. Elle était sur le point d’avoir le mal du pays lorsqu’elle entendit quelqu’un dire à côté d’elle : « Bonjour. Tu es une créature vraiment dangereuse, je crois. »

Maya se retourna, surprise. « Non, je ne le suis pas, dit-elle, j’ai décidé de ne pas être une créature dangereuse. »

Sur une feuille voisine était assise une petite créature hémisphérique, rouge-brun, ornée de sept points noirs, avec une petite tête aux yeux brillants. Ses pattes, fines comme des fils, semblaient presque délicates. Malgré l’apparence inhabituelle de l’inconnu, Maya sentit une sympathie immédiate pour lui.

« Puis-je vous demander qui vous êtes ? » demanda Maya poliment. « Je suis Maya, du peuple des abeilles. »

« Voulez-vous m’insulter ? » répondit la créature d’un ton sec. « Vous n’avez aucune raison de le faire. »

« Mais pourquoi est-ce que je t’insulte ? Je ne sais même pas qui tu es ! » s’indigna Maya.

« C’est facile de dire que tu ne me connais pas. Laisse-moi te rafraîchir la mémoire. » La petite créature se mit à tourner lentement sur elle-même.

« Tu veux dire que je dois compter tes points ? » demanda Maya, intriguée.

« Oui, si tu veux. »

« Sept points », constata Maya après un instant d’observation.

« Eh bien, tu ne sais toujours pas ? Notre nom de famille est Septempunctata. Cela signifie “sept points” en latin. Mais nous sommes mieux connus sous le nom de coccinelles. Je m’appelle Elvis et je suis poète de profession. »

Maya, craignant de le blesser à nouveau par une remarque maladroite, resta silencieuse un instant.

« Oh, ajouta Elvis avec un sourire, je vis du soleil, de la tranquillité du jour et de l’amour de l’humanité. »

« Mais tu ne manges rien ? » demanda Maya, surprise par cette étrange déclaration.

« Bien sûr que si. Je mange des pucerons. Et toi ? »

« Eh bien, non, ce n’est pas ça… »

« Qu’est-ce que c’est donc ? » 

« Ce n’est pas normal », répondit Maya, un peu gênée. 

« Naturellement », répondit Elvis, « En tant que citoyen modèle, on suit toujours ce qui est normal. Mais nous, les poètes, nous faisons les choses autrement. Tu as un moment pour m’écouter ? » 

« Oui, bien sûr », répondit Maya. « Alors, je vais te réciter un poème. Assieds-toi et ferme les yeux pour ne pas être distraite. Ce poème s’intitule ‘La forme de l’homme’ et il est très personnel. Écoute bien : tu ne m’as fait aucun mal. Tu m’as trouvé, mais cela n’a pas d’importance. Rond et long. Avec un bouclier. Se déplaçant aussi vite que la lumière. Rond et pointu au sommet. Solide à la base. » 

Après un silence, Elvis demanda doucement : « Alors, que penses-tu de ce poème ? » Il avait les yeux embués de larmes et sa voix tremblait.

« La forme de l’homme fait vraiment impression », répondit Maya, un peu timidement. Mais elle connaissait d’autres poèmes qu’elle trouvait plus beaux. 

« Et que penses-tu de la forme elle-même ? » demanda Elvis avec un sourire un peu triste, comme s’il était touché par l’impact qu’il avait eu. « Long et rond. C’est ce que vous avez dit dans le poème. » 

« Non, je parle de la forme artistique, de la structure de mes vers. » 

« Ah, oui. Oui, je trouve ça très bien. » « Ce que tu veux dire, c’est que c’est l’un des meilleurs poèmes que tu connaisses. La première condition de l’art, c’est qu’il doit apporter quelque chose de nouveau. Tu es d’accord avec ça ? » 

« Tout à fait, tout à fait », répondit Maya. « Je pense… »

« Votre foi et votre confiance en moi me submergent. Mais je dois partir, car la solitude est l’orgueil du poète. Adieu. »

« Adieu », répondit Maya, ne comprenant vraiment pas ce que la petite créature recherchait encore. Puis, elle se dit : peut-être qu’il n’a pas encore atteint sa maturité, puisqu’il est encore si petit. Elle le regarda se précipiter sur la branche. Ses petites pattes étaient à peine visibles. Maya tourna ensuite son regard vers le champ de blé doré où les papillons se posaient, et ce spectacle lui apportait plus de joie que les poèmes d’Elvis, la coccinelle. 


Chapitre 13: Maya L’abeille Dans La Forteresse Du Frelon

Maya avait fait une découverte remarquable. Cela se produisit un après-midi, près d’un vieux tonneau rempli d’eau de pluie. Elle était installée au milieu des fleurs de sureau au parfum enivrant, tandis qu’un rouge-gorge voletait gaiement au-dessus d’elle. Cet oiseau semblait si doux et joyeux que Maya ne pouvait s’empêcher de regretter qu’ils ne puissent être amis. Mais elle savait bien pourquoi : les oiseaux étaient bien trop grands, et ils risquaient de la manger.

Prudente, Maya s’était cachée au cœur d’une fleur de sureau. C’est alors qu’elle entendit soudain un soupir tout proche.

Lorsqu’elle se retourna, elle vit la créature la plus étrange qu’elle ait jamais vue. Il devait avoir au moins une centaine de pattes de chaque côté de son corps, pensa-t-elle. Il était environ trois fois plus grand qu’elle, il était mince et n’avait pas d’ailes.

« Mon Dieu ! » s’exclama Maya, stupéfaite. « Tu peux sans doute courir extrêmement vite. »

 L’étranger lui lança un regard curieux et réfléchit un moment. « Je ne crois pas être très rapide », dit-il. « Non, je ne crois pas. Il y a beaucoup à améliorer. J’ai trop de jambes. Tu vois, avant que toutes mes jambes ne commencent à bouger ensemble, cela prend beaucoup trop de temps. Je ne m’en étais pas rendu compte avant, et pourtant, j’ai souvent rêvé d’avoir encore plus de jambes. Mon souhait s’est réalisé… mais ce n’est pas si simple. Et toi, qui es-tu ? »

Maya, polie, se présenta avec un sourire. L’étranger hocha la tête et remua quelques-unes de ses longues jambes fines.

« Moi, je suis Thomas, de la grande famille des Mille-Pattes. Nous sommes très admirés, tu sais. Aucun autre animal n’a autant de pattes que nous. Pour les autres, huit pattes, c’est déjà beaucoup. »

Maya ouvrit grand les yeux. « C’est incroyable ! Tu es vraiment fascinant. Et cette couleur étrange que tu as, elle est si unique. Mais… as-tu une famille ? »

« Non, pourquoi aurais-je une famille ? À quoi cela me servirait-il ? Nous, les mille-pattes, sortons de l’œuf et voilà tout. Si nous ne pouvons pas nous tenir sur nos propres jambes, qui le pourra ? »

« Bien sûr », dit Maya en réfléchissant, « mais n’as-tu pas d’amis ? »

« Non, ma chère enfant. Je gagne mon pain… et je doute. »

« Oh ! Mais de quoi doutes-tu ? »

« Je suis né avec le doute. Douter est ma nature, je ne peux pas m’en passer. »

Maya le regarda, les yeux ronds de surprise. Que voulait-il dire par “douter” ? Elle brûlait d’envie de le comprendre, mais n’osait pas poser une question qui pourrait sembler impolie.

Thomas pointa alors du bout d’une de ses nombreuses pattes le grand saule qui se dressait non loin. « Premièrement, je doute que tu aies choisi le bon endroit pour te reposer. Tu ne sais pas ce qu’il y a dans ce grand saule là-bas, n’est-ce pas ? »

« Non », répondit Maya, intriguée.

« Tu vois, je doutais que tu le saches. La forteresse des frelons est là. »

Maya devint toute blanche comme un linge et sentit son cœur bondir dans sa poitrine. Elle faillit glisser de la branche où elle était perchée, saisie par la peur. « Où… où se trouve exactement cette forteresse des frelons ? » demanda-t-elle d’une voix tremblante.

Thomas agita une de ses longues pattes vers le vieux saule. « Regarde ce vieux nichoir à étourneaux, juste à la base du tronc. La porte du nichoir ne fait pas face au soleil levant, alors aucun oiseau ne vient y vivre. C’est là que les frelons ont élu domicile. Ces frelons, ce sont de véritables scélérats ! Ils attaquent les abeilles sans pitié. J’ai tout vu de mes propres yeux. »

Maya se sentit glacée de peur à l’idée de ces dangereux frelons. « Il vaut mieux que je m’en aille », dit-elle précipitamment. Elle ouvrit ses ailes, prête à s’envoler.

Mais avant qu’elle ne puisse bouger, un rire cruel et terrifiant résonna derrière elle. Elle sentit alors une poigne glaciale qui la saisit par le cou.

Thomas lâcha toutes ses pattes d’un coup et dégringola à travers les branches, la tête la première, avant d’atterrir avec un plouf dans le tonneau de pluie. « Je doute que tu t’en sortes, petite abeille ! » cria-t-il en tombant. Mais la pauvre Maya n’entendit rien de ses paroles, trop terrifiée pour prêter attention.

D’abord, elle ne distinguait pas clairement qui l’avait attrapée. Mais soudain, une grosse tête au-dessus d’elle apparut, avec de longues et terrifiantes pinces brillantes. Un frisson glacé parcourut Maya. Elle pensa d’abord que c’était une énorme guêpe, mais se rappela vite que c’était bien pire : c’était un frelon. Ce prédateur était magnifiquement rayé de noir et de jaune, mais sa taille effrayante – au moins quatre fois celle de Maya – faisait trembler la petite abeille.

Terrifiée, Maya murmura doucement : « À l’aide… »

Le frelon éclata d’un rire cruel. « Crie donc à l’aide, petite créature », dit-il d’une voix mielleuse et moqueuse. Puis, avec un sourire sinistre, il ajouta : « Mais je doute que quelqu’un vienne te sauver. »

« Laisse-moi partir ! » s’écria Maya avec toute la force de sa petite voix. « Laisse-moi partir ou je te pique droit au cœur ! »

Le frelon éclata d’un rire moqueur. « Droit dans mon cœur ? Quelle audace pour une si petite créature ! Mais ne t’inquiète pas, nous aurons tout le temps pour cela plus tard. »

Ces paroles firent bouillir Maya de rage. Elle sentit une nouvelle énergie l’envahir. Avec un cri de guerre courageux, elle rassembla toute sa force et lança son dard vers le milieu de la poitrine du frelon. Mais, à sa grande surprise et son désarroi, son dard se plia sans réussir à pénétrer la carapace du frelon. L’armure du méchant était bien trop dure pour elle.

Le sourire du frelon s’effaça, laissant place à un air sombre et menaçant. Il marqua une pause, ses yeux brillant d’un éclat de fureur. « Je pourrais te punir et te mordre à la tête. Mais non, je crois que la reine aimerait mieux s’occuper de toi. Je vais t’emmener à elle. »

Le frelon emporta Maya directement à la forteresse des frelons. La petite abeille trouva l’endroit si effrayant qu’elle s’évanouit en chemin. Lorsqu’elle revint à elle, elle était plongée dans la pénombre, dans un endroit qui dégageait une odeur désagréable. Maya comprit qu’elle était enfermée dans la prison des frelons. Elle voulut pleurer, mais aucune larme ne vint.

« Heureusement, je n’ai pas encore été mangée, mais cela pourrait arriver », pensa-t-elle en frissonnant.

Dehors, elle entendait des voix, et un peu de lumière filtrait à travers une fente étroite. Maya observa les murs autour d’elle. Contrairement aux abeilles, qui utilisent de la cire, les frelons construisaient leurs parois avec une matière sèche ressemblant à du papier.

Prise d’angoisse, elle commença à gémir doucement. Les voix, de l’autre côté, devinrent plus claires. Intriguée, Maya se hissa jusqu’à la fente pour regarder. Ce qu’elle vit la laissa sans voix.

Une immense salle s’étendait devant elle, éclairée par des vers luisants capturés, suspendus ici et là. Au centre, sur un trône majestueux, était assise la reine des frelons, entourée de ses sujets. La pièce était remplie de frelons imposants, occupés à discuter sérieusement.

Maya, bien qu’effrayée, ne pouvait s’empêcher d’être impressionnée par leur apparence et leur puissance. C’était la première fois qu’elle voyait une telle scène, et, malgré sa terreur, elle restait fascinée.

Un sergent frelon fit le tour de la grande salle, aboyant des ordres aux vers luisants pour qu’ils brillent davantage. La lumière devint plus intense, révélant chaque détail de la scène. Maya entendit alors la voix autoritaire de la reine des frelons résonner :

« Bien, nous respecterons les accords conclus. Demain, nos guerriers se mettront en route pour attaquer la cité des abeilles dans le parc du château. La ruche doit être pillée, et les abeilles, capturées. Celui qui m’apportera la reine Hélène VII vivante sera fait chevalier. Soyez braves et rapportez-moi un riche butin ! La séance est levée. »

Sur ces mots, la reine des frelons se leva de son trône, sa silhouette imposante se détachant à la lumière des vers luisants. Elle quitta la salle, entourée de ses gardes du corps intimidants.

Maya sentit son cœur se serrer. « Ma patrie, murmura-t-elle en larmes, mes chères abeilles. » Une vague de désespoir l’envahit. Elle voulait crier, mais sa gorge était nouée. « Personne ne peut prévenir mon peuple. Ils seront attaqués dans leur sommeil… Peut-être qu’un miracle arrivera. »

Peu à peu, la lumière des vers luisants diminua, plongeant la grande salle dans une obscurité presque totale. Le silence s’installa dans la forteresse. Il semblait que plus personne ne prêtait attention à Maya, oubliée dans sa prison sombre et froide.

Elle crut entendre, au loin, le chant apaisant des grillons nocturnes. Mais elle restait enfermée dans l’obscurité oppressante, seule et impuissante, dans la prison des frelons.


Chapitre 14: Maya L’Abeille Et La Sentinelle

Le désespoir de Maya se transforma en une résolution inébranlable. Elle se rappela qu’elle était une abeille, une fière représentante de sa colonie.

« Pourquoi me plaindre comme si je n’avais pas de cerveau ou de courage ? Ce n’est pas ainsi que je défendrai l’honneur de ma reine et de ma ruche. Ils sont en danger, et moi aussi. Si je dois affronter la mort, autant le faire en étant brave et en essayant de sauver mon peuple. »

Bien qu’elle ait été loin de chez elle depuis longtemps, Maya sentit un lien profond avec sa communauté. Elle portait désormais le poids d’une grande responsabilité, car elle était la seule à connaître le complot des frelons. Avec une larme au coin de l’œil, elle murmura : « Longue vie à ma reine… »

Un brusque « Silence, s’il vous plaît ! » interrompit ses pensées. C’était la sentinelle des frelons, qui passait pour sa ronde du soir. Maya se tapit dans l’ombre, le cœur battant.

Lorsque la sentinelle s’éloigna, Maya se précipita vers la fente par laquelle elle avait observé la salle. Avec précaution, elle l’élargit juste assez pour s’y faufiler. Elle atterrit dans la grande salle à présent plongée dans l’obscurité. Les ronflements lourds des frelons endormis résonnaient autour d’elle.

Une douce lumière bleutée éclairait faiblement l’endroit. Maya leva les yeux et vit, à travers une petite ouverture, le clair de lune et, au loin, une étoile scintillante. Elle poussa un soupir profond. « Liberté », pensa-t-elle, son cœur débordant d’espoir.

Elle commença à ramper doucement vers la sortie, retenant son souffle à chaque mouvement. « Si je peux voler, se dit-elle, je serai libre en un instant. »

Mais soudain, son élan s’arrêta net. Là, dans l’ombre de la grande porte, une sentinelle était postée. Le frelon se tenait adossé à une colonne.

La petite Maya resta pétrifiée, incapable de bouger. Toute lueur d’espoir d’évasion semblait s’éteindre. Comment pouvait-elle se faufiler, maintenant qu’une imposante sentinelle gardait la sortie ? Le frelon fixait l’horizon baigné de lumière lunaire, son armure luisant minutieusement sous les rayons d’argent. Quelque chose dans sa posture frappa Maya.

« Il a l’air mélancolique, pensa-t-elle, mais aussi si noble avec son magnifique bouclier. Toujours prêt à se battre ou à mourir. »

Maya sentit son cœur se serrer. Comme souvent, sa bonté naturelle et son admiration pour la beauté des choses faisaient oublier à la petite abeille tout sens du danger. Mais soudain, un éclat de lumière dorée jaillit du casque de la sentinelle.

« Mon Dieu ! » murmura Maya, croyant sa fin arrivée.

À sa grande surprise, la sentinelle lui adressa calmement la parole : « Approche, petite. »

Maya, abasourdie, s’écria : « Quoi ? Tu m’as vue ? »

Le frelon répondit, toujours aussi tranquille : « Bien sûr. Tu as percé un trou dans le mur et rampé jusqu’ici. Mais maintenant, tu sembles avoir perdu ton courage, n’est-ce pas ? »

Maya baissa les yeux, tremblante : « Oui… c’est vrai », avoua-t-elle.

Elle se souvenait avec effroi de la redoutable vigilance des frelons. Leurs sens étaient aiguisés comme des lames. Elle n’avait jamais eu de chance.

Le frelon lui demanda d’un ton presque léger : « Mais que fais-tu ici ? »

Cependant, Maya ne pouvait s’empêcher de remarquer son air pensif, presque détaché, comme si son esprit était ailleurs, loin des affaires qui l’entouraient.

Prenant une grande inspiration, Maya trouva le courage de répondre : « Je veux sortir, mais j’ai peur. Et toi… toi, tu avais l’air si fort et si beau dans cette armure. Mais maintenant… maintenant, je vais me battre contre toi. »

À ces mots, la sentinelle esquissa un sourire, visiblement surprise par tant d’audace. Un sourire chaleureux, presque bienveillant. Maya se sentit enchantée par lui.

« Nous ne nous battrons pas, petite abeille », déclara la sentinelle d’une voix grave et paisible. « Vos abeilles sont puissantes en tant que peuple uni, mais nous, les frelons, sommes plus forts individuellement. Tu peux rester ici et parler un peu, mais pas trop longtemps. Je dois bientôt réveiller les soldats, et après cela, tu devras retourner dans ta cellule. »

Maya, les yeux grands ouverts, était envahie par un mélange d’admiration et de tristesse. Elle observait son ennemi, captivée par sa prestance et ses paroles. Suivant l’élan sincère de son cœur, elle s’écria :
« J’ai toujours entendu dire que les frelons étaient mauvais. Mais toi, tu n’es pas comme ça. Je ne peux pas croire que tu sois mauvais. »

Le frelon, touché par cette déclaration, mais toujours sérieux, répondit sérieusement :
« Il y a de bonnes et de mauvaises créatures partout, petite abeille. Mais tu ne dois pas oublier une chose essentielle : nous sommes tes ennemis, et nous le resterons toujours. »

« Mais un ennemi doit-il constamment être mauvais ? » demanda Maya d’une voix douce. « Quand je t’ai vu sous le clair de lune, j’ai oublié que tu étais dangereux et cruel. Tu avais l’air triste. J’aiabsolument pensé que les êtres tristes ne pouvaient pas être mauvais. »

Le garde resta silencieux, immobile comme une statue. Encouragée par son silence, Maya poursuivit audacieusement : « Tu es fort. Tu peux me remettre dans ma cellule, et je mourrai. Mais tu pourrais aussi me libérer, si tu le voulais. »

À cet instant, le garde se leva. Son armure cliqueta doucement, et le bras qu’il leva brilla faiblement sous la lumière argentée de la lune.
« Tu as raison, je pourrais te libérer », dit-il d’une voix grave. « Mais mon peuple et ma reine m’ont confié ce pouvoir. Aucune abeille qui entre dans cette forteresse ne peut en sortir vivante. Je resterai fidèle à mon peuple. »

Au bout de quelques instants, il ajouta d’un ton plus doux, presque murmuré :
« J’ai appris par une expérience amère à quel point la déloyauté peut blesser, lorsque Lovey m’a quitté… »

Maya sentit son cœur se serrer en entendant ces paroles pleines de tristesse et de loyauté. Elle comprit qu’au fond, lui aussi obéissait à un devoir, tout comme elle. Chaque camp faisait face à l’autre, rempli d’un même mélange de dévouement et de douleur.

Mais Lovey… Qui était-elle ? Une idée traversa l’esprit de Maya, et son excitation monta en elle, bien qu’elle n’osât encore espérer trop fort. Prudemment, elle demanda : « Qui est Lovey, si je puis me permettre ? »

« Ça n’a pas d’importance, petite. Elle ne te concerne pas, et elle est perdue pour moi à jamais. Je ne la retrouverai jamais. »

« Mais je connais Lovey », dit Maya avec autant de nonchalance que possible. « C’est la plus belle de toutes. »

L’attitude du garde changea soudainement. Il bondit vers Maya et s’écria : « Quoi ! Tu connais Lovey ? Dis-moi où elle est. Dis-le-moi tout de suite. »

« Non. » Maya parla calmement et résolument.

« Je t’arracherai la tête si tu ne me le révélas pas. » Le garde se rapproche dangereusement.

« C’est ce qui va se passer de toute façon. Je ne trahirai pas Lovey. C’est une bonne amie à moi, et vous voulez l’enfermer. »

Maya vit que le garde se débattait et avait un conflit intérieur.

« Il est temps de réveiller les soldats. Non, petite abeille, je ne veux pas faire de mal à Lovey. Je l’aime de tout mon cœur. Je donnerais ma vie pour elle. Dis-moi où je peux la trouver. »

Maya est intelligente. Elle hésite délibérément avant de dire : « Mais j’aime ma vie ».

« Si tu me dis où vit Lovey, je te libère. » Maya vit que le garde avait du mal à prononcer ces mots.

« Tu tiendras ta parole ? »

« Je vous donne ma parole de gardien », déclara-il avec fierté.

Maya, remplie d’espoir, sentit une lueur de bonheur. Peut-être pourrait-elle sauver son peuple après tout.

« Je vous crois », répondit-elle avec confiance. « Lovey vit dans une crique au bord d’un grand lac, sous les tilleuls, près du château. Vous la trouverez là, chaque jour à midi, quand le soleil brille haut dans le ciel, entourée de nénuphars blancs. »

Le garde, les mains pressées contre son front pâle, semblait profondément troublé. Après un moment de silence, il murmura : « Vous dites la vérité. Elle m’a parlé d’un endroit avec des fleurs blanches. Ce sont sûrement celles dont vous parlez. Envolez-vous maintenant. Merci. »

Il se recula, libérant le chemin. Le jour commençait à se lever.

« Un gardien tient sa parole », ajouta-t-il.

Il ne savait pas que Maya avait entendu la réunion et pensait qu’une petite abeille en plus ou en moins ne changerait pas grand-chose.

« Au revoir », s’écria Maya, les ailes battant fort. Il n’y avait pas de temps à perdre. Elle s’envola, sans un mot de remerciement, prête à sauver son peuple.


Chapitre 15: Maya L’Abeille Prévient La Reine

Maya, courageuse et déterminée, rassembla ses dernières forces. Elle s’élança dans l’aube violette, volant aussi vite que ses petites ailes le lui permettaient. Elle savait qu’elle devait atteindre la ruche avant qu’il ne soit trop tard. L’air était frais, presque glacé, et de légers voiles de brume flottaient au-dessus des champs endormis. Tout semblait calme, comme si le monde retenait son souffle.

Maya volait haut dans le ciel, regardant parfois la forêt en dessous, cherchant un abri au cas où les frelons viendraient à la poursuivre. Elle savait que si elle prévenait sa colonie à temps, les abeilles pourraient se préparer à défendre leur maison. Mais si l’attaque surprise réussissait, la ruche serait perdue. Cette pensée la rendait davantage inquiète.

En volant, Maya se rappelait la force et l’énergie de son peuple. Chaque abeille travaillait dur pour la reine et pour la colonie. Leur courage était immense, et leur loyauté sans faille. Maya sentit une grande fierté monter en elle, mais aussi une colère brûlante contre les frelons.

Cependant, tout n’était pas facile. Maya ne reconnaissait pas le chemin dans la vaste forêt. Elle s’était éloignée si loin qu’elle en avait perdu ses repères. Le froid, cruel et piquant, lui faisait mal, et ses ailes fatiguées menaçaient de céder. Elle plissait les yeux pour distinguer le paysage flou sous elle, mais la lumière naissante ne suffisait pas.

Maya, essoufflée et tremblante, s’approcha enfin des murs protecteurs de la ruche. Au loin, elle aperçut sa terre natale nichée entre les grands sapins bleus et verts. Son cœur battait si fort qu’elle crut qu’il allait éclater, mais elle ne ralentit pas. L’entrée de la ruche était tout proche, gardée par deux sentinelles immobiles, prêtes à tout pour défendre leur foyer.

Quand elles la virent arriver, l’une d’elles leva son arme et cria d’une voix autoritaire : « Halte ! » Maya, incapable de parler, se posa devant elles, haletante. Elle essaya de reprendre son souffle, mais les gardes, méfiants, ne lui laissèrent pas le temps. « Qui es-tu ? Que viens-tu faire ici ? » demanda l’une des sentinelles d’un ton brusque.

Maya ouvrit la bouche pour répondre, mais sa fatigue l’en empêcha. Alors, la seconde sentinelle s’approcha et la repoussa brutalement. « Recule, toi ! » dit-elle en fronçant les sourcils. « Si tu ne fais pas demi-tour, nous te tuerons. »Maya chancela sous le choc, mais elle ne bougea pas. « Je dois parler à la reine, c’est urgent ! » voulut-elle crier, mais aucun son ne sortit. Elle voyait la méfiance briller dans les yeux des sentinelles. L’une d’elles secoua la tête et grogna : « Qu’est-ce qui ne va pas chez toi ? Je n’ai jamais rien vu de pareil. »

Maya, rassemblant ses dernières forces, murmura le mot de passe secret que seules les abeilles connaissaient. Les sentinelles s’écartèrent immédiatement.

« Quoi ? » s’exclamèrent-elles. « Tu es l’une des nôtres et nous ne te connaissions pas ? Comment est-ce possible ? »

« Laissez-moi voir la reine ! » supplia Maya, le souffle court. « Tout de suite, vite ! Nous sommes en grand danger ! »

Les sentinelles échangèrent un regard incertain. L’une d’elles secoua la tête et répondit :
« On ne peut pas réveiller la reine avant le lever du soleil. C’est la règle. »

Maya, désespérée, s’écria avec une voix tremblante d’urgence :
« Alors, la reine ne se réveillera jamais vivante ! La mort me suit de près. Amenez-moi à elle immédiatement ! »

Sa voix, emplie d’une telle furie et d’une telle détermination, fit frissonner les gardes. Pris de peur, ils obéirent sans plus discuter.

Ensemble, ils se précipitèrent à travers les rues et les couloirs de la cité. Maya, bien qu’épuisée, sentait son cœur se réchauffer à mesure qu’elle reconnaissait chaque coin familier. Les souvenirs l’inondaient, mais elle ne pouvait se permettre de ralentir.

« Je suis à la maison », balbutia-t-elle.

Arrivée dans la salle de réception de la reine, Maya faillit s’effondrer de fatigue. L’une des sentinelles la rattrapa juste à temps, tandis que l’autre s’élança vers les quartiers privés pour alerter la reine.

Autour d’elles, les premières abeilles commençaient à s’éveiller, sortant curieusement la tête par les petites ouvertures. Bientôt, la nouvelle se propagea comme une traînée de poudre.

Deux officiers en uniforme brillant émergèrent des appartements royaux. Maya les reconnut aussitôt : c’étaient les conseillers les plus proches de la reine. Sans un mot, ils prirent place de chaque côté de la porte, dans un silence solennel : la reine allait apparaître. 

Elle arriva sans ses courtisans, seulement accompagnée de son assistante et de deux dames d’honneur. Elle se dirigea immédiatement vers Maya. En voyant l’état misérable de la petite abeille, l’expression sévère de son visage se radoucit légèrement.

« Tu es venue avec un message important ? Qui es-tu ? » demanda-t-elle.

Maya, épuisée, réussit à murmurer seulement deux mots : « Les frelons ! »

Le visage de la reine pâlit un instant, mais elle resta immobile et calme.

« Puissante reine », sanglota Maya. « Pardonne-moi de n’avoir pas accompli mon devoir. Plus tard, je te raconterai tout, car j’ai des remords dans le cœur. Mais écoute-moi : il n’y a pas longtemps, comme par miracle, je me suis échappée du fort des frelons. La dernière chose que j’ai entendue avant de fuir, c’est qu’ils prévoient d’attaquer et de piller notre royaume au lever du soleil. »

À ces mots, une consternation indescriptible envahit la salle. Les dames d’honneur, les gardes et l’assistante de la reine semblaient frappés de panique. Certains voulaient fuir, d’autres ne savaient où se tourner.

Mais la reine, immobile et digne, resta d’un calme impressionnant. Elle se tenait droite, dans toute sa majesté, et son visage inspirait à la fois crainte et confiance. En cet instant, sa présence était plus royale que jamais. Il semblait qu’elle n’avait jamais montré autant de grandeur depuis qu’elle était montée sur le trône.

La reine fit un signe à ses officiers, qui s’inclinèrent et s’éloignèrent rapidement pour exécuter ses ordres. Puis, elle se tourna vers Maya, son visage empreint de douceur et de bienveillance.

« Oh, ma reine ! » murmura Maya.

La reine se pencha vers la petite abeille et lui adressa un regard rempli d’affection et de tendresse.

« Notre gratitude est énorme » dit-elle. « Tu nous as sauvées. Peu importe ce que tu as pu faire auparavant, tu l’as racheté mille fois par ton courage. Mais repose-toi maintenant, ma fille, tu sembles si épuisée. Tes ailes tremblent. »

« J’aimerais mourir pour toi, » balbutia Maya, la voix brisée par l’émotion.

La reine sourit délicatement. « Ne t’inquiète pas pour nous, » répondit-elle. « Dans cette cité, parmi nos milliers d’habitants, pas une seule abeille n’hésiterait à donner sa vie pour moi et pour le bien-être de notre royaume. Va, ma chère, repose-toi maintenant. »

Elle se pencha encore un peu plus et déposa un baiser sur le front de Maya. Ce geste emplit le cœur de la petite abeille d’un mélange de fierté et de gratitude. La reine fit alors un signe aux dames d’honneur, qui prirent Maya avec délicatesse pour s’occuper d’elle.

La petite abeille, émue par les paroles pleines de bonté de la reine, se laissa emmener, presque sans résistance. Tout semblait fantastique, comme un rêve. Maya entendait à peine, au loin, des bruits qui semblaient venir des profondeurs de la ruche. Elle sentit la vibration des murs et du sol sous elle.

« Les soldats ! Nos soldats se préparent ! » chuchotèrent les dames d’honneur à côté d’elle.

À peine consciente, Maya perçut encore, dans un demi-sommeil, le martèlement rythmé des troupes qui passaient près de sa porte. Les voix résonnaient, claires et déterminées, alors que des ordres joyeux s’élevaient.

Et dans ses rêves, comme un doux écho venu d’un lointain passé, Maya entendit le vieux chant des abeilles :

« Ô lumière du soleil, avec tes rayons d’or et ton éclat radieux, grâce à ta lueur, nos vies s’illuminent, bénis notre travail, bénis notre reine, soyons unis pour toujours. »


Chapitre 16: Maya L’Abeille Au Combat

Une grande agitation régnait dans le royaume des abeilles. La ruche bourdonnait de colère et de détermination. Tout le monde était prêt à affronter le vieil ennemi, les frelons, et à se battre jusqu’au bout. Mais malgré l’effervescence, tout se déroulait dans l’ordre. Chaque abeille connaissait son rôle et occupait sa position.

À l’appel de la reine, un groupe d’abeilles courageuses s’avança pour défendre l’entrée de la ruche. Certaines d’entre elles reçurent l’ordre de partir en éclaireuses et d’observer l’approche des frelons. Les autres prirent place devant l’entrée, formant une barrière protectrice. Les frelons étaient en route, et dans toute la ruche, un silence pesant s’installa. 

Les soldats se tenaient en rang devant l’entrée, calmes et fiers. Aucun murmure ne troublait leur discipline. Tout semblait figé. La lumière du jour commençait à poindre, et dans la semi-obscurité, l’entrée avait été soigneusement rétrécie par une épaisse couche de cire, rendant l’accès plus difficile à l’ennemi.

La reine, avec son port majestueux, se tenait sur une position surélevée d’où elle pouvait superviser la bataille. Ses assistantes allaient et venaient, transmettant ses ordres et s’assurant que tout était en place.

C’est alors qu’un éclaireur revint. Il s’effondra, épuisé, aux pieds de la reine.

« Je suis le dernier… » murmura-t-il faiblement. « Les autres ont été tués. »

Mais la reine, droite et impassible, s’adressa au messager : « Où sont les frelons ? »

Le messager leva la tête avec difficulté et répondit : « Aux tilleuls… Écoutez… »

« Combien sont-ils ? » demanda la reine sévèrement. « Réponds à voix basse. »

Le messager sembla rassembler ses dernières forces avant de murmurer : « J’en ai compté quarante… »

Bien que la reine fût bouleversée par le nombre des ennemis, elle n’en laissa rien paraître. D’une voix forte et assurée, elle dit : « Aucun d’entre eux ne reverra sa maison. »

Ces paroles eurent un effet immédiat. Le courage revint dans le cœur de toutes les abeilles, et elles se tinrent prêtes. Mais à cet instant, un grand bourdonnement se fit entendre à l’extérieur de la ruche. Les frelons approchaient. Une légère peur s’insinua parmi les abeilles. Cependant, la voix calme et résolue de la reine retentit depuis son trône :

« Laissez-les entrer un par un jusqu’à ce que je donne l’ordre d’attaquer. Alors, nous frapperons tous ensembles, par centaines, et nous bloquerons l’entrée. Souvenez-vous : le sort de la ruche repose sur votre force, votre endurance et votre courage ! N’ayez pas peur, l’ennemi ne sait pas que nous sommes prêtes. »

Elle se tut. Le silence tomba sur la ruche. La première tête de frelon apparut à l’entrée. Les abeilles tremblèrent, mais elles restèrent immobiles, obéissant aux ordres.

Le frelon recula prudemment et dit à voix basse : « Elles dorment profondément. Mais l’entrée est à moitié murée, et il n’y a aucun garde. Je ne sais pas si c’est un bon ou un mauvais signe. »

Dehors, une voix répliqua : « Un bon signe ! En avant ! »

Les frelons s’élancèrent dans la ruche, se frayant un chemin. Cependant, la reine des abeilles n’avait toujours pas donné l’ordre d’attaquer. Était-elle submergée par l’émotion ou attendait-elle le moment parfait pour frapper ? Les frelons, confiants, ne remarquèrent pas les rangées d’abeilles prêtes à bondir, alignées à gauche et à droite.

Enfin, la voix de la reine s’éleva, forte et pleine d’autorité : « Au nom de la justice éternelle, au nom de votre reine, défendez le royaume ! »

Le cri de guerre fut immédiat, et la ruche entière devint un tourbillon de vie et de bruit. Une jeune abeille, impatiente, se jeta la première dans la bataille avant même l’ordre officiel. Elle piqua un frelon avec toute son énergie, mais fut immédiatement capturée et tuée. Son sacrifice inspira ses sœurs, qui, animées par son courage, se précipitèrent avec une ardeur renouvelée contre les envahisseurs.

La lutte était féroce. Les abeilles attaquaient sans relâche, mais les frelons, avec leurs corps robustes et leurs boucliers naturels, semblaient presque invincibles. Leur taille gigantesque et leur force rendaient le combat difficile. Pourtant, la stratégie de la reine commençait à porter ses fruits.

Malgré les pertes nombreuses dans leurs rangs, les abeilles devenaient plus féroces à chaque instant. La colère et le désespoir leur donnaient une énergie nouvelle, et elles combattaient avec une détermination sans faille. Peu à peu, les frelons à l’intérieur de la ruche tombèrent. Les survivants ne répondaient plus aux appels désespérés de leurs compagnons restés à l’extérieur. Leur nombre avait drastiquement diminué, réduit de moitié.

« Nous avons été trahis », dit le chef des frelons. « Les abeilles étaient prêtes. »

Les frelons s’étaient regroupés sur le grand sapin argenté. Autour de leur chef, les guerriers se tenaient silencieux, livides de rage et de dépit. Une terrible hésitation pesait sur eux. Que devait-il faire ? Céder à sa soif de vengeance ou choisir la prudence ? Luttant contre son désir de destruction, le chef opta pour la raison. Toute sa tribu était menacée d’anéantissement.

À contrecœur, il envoya un messager vers la ruche des abeilles. « Exigez la libération des nôtres », ordonna-t-il avec une voix lourde de frustration.

Le messager s’approcha de l’entrée de la ruche, agitant une feuille blanche de jasmin en signe de paix. Mais les abeilles restèrent silencieuses, leur réponse étant un refus tacite.

Le chef, furieux et de plus en plus inquiet, dépêcha un second messager, cette fois avec des mots plus conciliants. « Vite ! » dit-il en tendant la feuille de jasmin. « Dites aux abeilles que si elles nous rendent nos captifs, nous leur promettons de ne plus jamais troubler leur royaume. Mais hâtez-vous, car bientôt les gens viendront, et ce sera notre fin. »

Le second messager s’élança vers la ruche, brandissant le signal de paix. À l’intérieur, la reine des abeilles fut immédiatement informée. Elle envoya son assistante pour répondre à la demande.

Elle lui fit porter cette réponse : « Nous ne détenons aucun captif. Tous les frelons qui ont envahi notre domaine ont trouvé la mort. Nous vous renvoyons vos morts. Quant à votre promesse de ne jamais revenir, nous n’y croyons pas. Mais sachez ceci : si vous choisissez de poursuivre le combat, nous sommes prêtes à nous battre jusqu’à la dernière abeille. »

Le chef des frelons, enragé, sentit son désir de vengeance s’enflammer. Mais il savait que continuer la bataille serait pure folie.

« Nous reviendrons », déclara sombrement le chef des frelons. « Comment cela a-t-il pu nous arriver ? Ne sommes-nous pas plus puissants que ces abeilles ? Comment annoncer cette défaite à notre reine ? Il doit y avoir une trahison quelque part. »

Un frelon plus âgé, respecté pour sa sagesse et proche de la reine des frelons, prit la parole :
« Il est vrai que nous sommes physiquement plus forts, mais les abeilles ont quelque chose que nous n’avons pas : elles sont unies, inébranlables et totalement dévouées à leur État. Leur loyauté et leur solidarité sont leur plus grande force. Aucune d’entre elles ne deviendrait jamais un traître. Elles pensent toujours au bien commun avant leur propre intérêt. »

Le chef des frelons, encore consumé par la rage, ignora ces paroles de sagesse.
« Je n’ai que faire des leçons tirées d’une simple abeille, » grogna-t-il. « Je suis un bandit, et je mourrai comme tel. Mais il serait insensé de poursuivre le combat aujourd’hui. »

Avec un mélange de dépit et de résignation, il envoya ce message à la reine des abeilles :
« Rendez-nous nos morts. Nous nous retirons. »

Lorsque la reine des abeilles reçut ce message, elle demeura prudente.
« Nous devons nous méfier de toute ruse, » dit-elle à ses conseillers. Néanmoins, elle ordonna que les corps des 21 frelons tombés soient sortis de la ruche et rendus à leurs semblables.

Ainsi, la bataille prit fin. Les abeilles avaient remporté la victoire.

Mais à quel prix ? Pas une seule abeille n’avait eu l’occasion de profiter de cette belle matinée d’été, emplie de parfums de fleurs et de lumière douce. Pourtant, à midi, la ruche était déjà revenue à sa routine. Elles ne célébrèrent pas leur triomphe, ni ne pleurèrent leurs morts. Chaque abeille portait dans son cœur, en silence, la fierté de la victoire et le chagrin de la perte. Et, comme toujours, elles se dévouèrent à nouveau au service de leur royaume.


Chapitre 17: Maya L’Abeille Devient L’Amie De La Reine

Le bruit sourd et incessant de la bataille tira Maya de son court sommeil agité. Encore faible, elle tenta de se lever. Son premier réflexe fut de voler à l’entrée pour aider ses semblables, mais son corps trahissait sa volonté. Elle se sentait bien trop faible.

À cet instant, un groupe d’abeilles roulait au sol, se battant férocement avec un frelon. Le frelon, visiblement épuisé, se débattait avec tout ce qu’il lui restait de force. Pourtant, malgré son acharnement, il finit par céder. Il s’effondra au sol, immobile, mais encore vivant. Les abeilles, sans perdre de temps, se précipitèrent à l’entrée de la ruche pour rejoindre leurs camarades dans la lutte.

Maya resta immobile un instant, son cœur battant à toute vitesse. Enfin, elle s’approcha du frelon étendu, dont le corps, bien que robuste, semblait brisé par la fatigue et les blessures. Elle remarqua qu’il respirait encore, bien que faiblement. Poussée par un élan de compassion, elle s’envola chercher un peu d’eau et de miel pour le réconforter.

De retour près de lui, Maya déposa son offrande à ses côtés. Mais à son grand étonnement, le frelon secoua lentement la tête et repoussa le cadeau de sa main griffue.

« Je prends ce que je veux », grogna-t-il, la voix empreinte d’un orgueil blessé. « Je n’accepte rien qu’on me donne. »


« Oh », murmura-t-elle, « je pensais seulement que tu avais soif. »

Le jeune frelon, bien que gravement affaibli, parvint à esquisser un sourire à Maya. Puis, avec une gravité inhabituelle et une voix calme, il déclara : « Je dois mourir. »

Maya resta sans voix. Une vague d’émotion l’envahit, et pour la première fois, elle sentit véritablement ce que signifiait l’inévitabilité de la mort.

« Si seulement je pouvais faire quelque chose… », murmura-t-elle, les larmes coulant sur son visage.

Mais le frelon ne répondit pas. Son regard, une seconde plus tôt, empreint d’une étrange sérénité, s’était éteint à jamais.

Maya, profondément touchée, n’oublia jamais ce qu’elle avait appris de ce bref adieu. Elle savait maintenant que ses ennemis étaient des créatures comme elle, qui aimaient aussi la vie.

Elle se souvint des paroles de l’elfe des fleurs, qui lui avait parlé de la renaissance au printemps. Cette idée lui apporta un certain réconfort. Elle se demandait si, comme les fleurs, d’autres créatures connaissaient aussi un renouveau après la mort.

« Je vais croire que c’est le cas », se dit-elle.

Puis, on interpela Maya auprès de la reine. La petite abeille, très timide, tremblait sur ses pattes fines. L’atmosphère était très lourde, car certains officiers n’étaient pas revenus de la bataille. Mais, au milieu de cette morosité, on sentait aussi de la joie.

La reine, majestueuse et belle, se leva. Elle s’approcha de Maya et, à la grande surprise de tous, la prit tendrement dans ses bras. Maya, émue jusqu’au fond de son cœur, ne s’attendait pas à un tel geste. Submergée par l’émotion, elle éclata en sanglots.

Les abeilles présentes étaient bouleversées. Elles regardaient Maya avec admiration et gratitude. Cette petite abeille avait accompli un acte héroïque de bravoure.

Maya, encore émue, raconta alors son incroyable aventure. Elle parla du plan terrifiant des frelons et expliqua comment elle s’était échappée de leur sombre prison. Elle raconta aussi ses rencontres : la libellule aux ailes brillantes comme des diamants, la sauterelle bondissante, l’araignée Thekla et le joyeux Puck. Elle évoqua l’aide précieuse de Bobbie, l’ami fidèle.

Quand Maya parla de l’elfe des fleurs aux cheveux d’or et des humains géants, un grand silence tomba dans la ruche.

« Ah ! », dit la reine avec un doux sourire. « Qui aurait cru que les elfes des fleurs étaient si merveilleux ? Leur chant est un enchantement. »

Maya continua son récit, racontant les plans des frelons et les dangers qu’elle avait affrontés. Toutes les abeilles l’écoutaient, suspendues à ses mots, le cœur battant.

« Quelle horreur ! », murmura la reine, l’air grave.

Maya termina : « Et c’est ainsi que je suis rentrée chez moi. Je demande à Votre Majesté de bien vouloir me pardonner. »

Mais personne ne fit de reproches à la petite Maya pour s’être enfuie de la ruche.

« Tu n’as pas oublié ta maison ni ton peuple », dit gentiment la reine avec un regard tendre. « Au fond de ton cœur, tu es toujours restée loyale. C’est pourquoi nous ne te bannissons pas. Désormais, tu resteras à mes côtés et tu m’aideras dans les affaires de l’État. Tu pourras utiliser tout ce que tu as appris au cours de tes aventures pour le bien de ton peuple et de ton royaume. »

Un grand murmure d’approbation parcourut la ruche, vibrant comme une douce mélodie.

Ainsi se terminent les aventures de Maya l’abeille. On raconte qu’elle fit beaucoup de bien à sa colonie et qu’elle fut chérie par toutes les abeilles. Maintenant, elle vit paisiblement comme une vieille dame, avec une pension de miel bien méritée.

Le soir, parfois, Maya raconte ses histoires aux jeunes abeilles, qui se pressent autour d’elle, les yeux brillants d’admiration, écoutant avec émerveillement ses récits d’aventures extraordinaires.


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