Les lapins du petit roi

Un matin, lorsque le petit roi ouvrit les yeux, il découvrit avec horreur que tous ses lapins de compagnie avaient disparu ! Personne ne savait où ils étaient passés. Même le vieux hibou, qui veillait chaque nuit, n’avait rien vu. Ces lapins n’étaient pas ordinaires : ils avaient un pelage blanc comme la neige, des yeux étincelants et de petites oreilles roses. Imaginez combien le petit roi était triste et inquiet en apprenant qu’ils s’étaient égarés.

D’un ton désespéré, il disait à tous ceux qui venaient le voir : « Trouvez mes lapins blancs, je vous en supplie ! Je vous récompenserai comme vous le souhaitez, même si c’est la couronne que je porte sur ma tête. » 

Et, bien sûr, à ces paroles du petit roi, tout le monde se mit aussitôt à chercher les lapins.

Les princes et princesses, les ducs et duchesses, les comtes et comtesses, et toutes les autres nobles dames et messieurs de la cour montèrent dans leurs élégants carrosses et se rendirent en ville pour chercher les petits animaux perdus et ils revinrent tous très heureux. Ils ne les avaient pas trouvés, cependant, en passant devant une confiserie, ils achetèrent de charmants lapins en bonbons, sucrés et brillants.

Voilà, ils rentrèrent au château tout heureux de leur découverte. « Regardez ! » dirent-ils joyeusement au petit roi. « Ces lapins sont si délicieux et si doux, bien plus doux que des lapins vivants ! »

Mais le petit roi fronça les sourcils et secoua la tête avec tristesse. 

« Ils ne peuvent être que mangés, » répondit-il d’un ton amer. Puis, il ordonna que les lapins en bonbons soient emportés dans le garde-manger. 

Les soldats du petit roi, convaincus que le roi du pays voisin avait pris les lapins, décidèrent d’agir. En rang serré, ils gravirent la colline, tambours battant avec un grand « bum, bum, bum ». Leurs uniformes rouges brillaient comme la crête d’un coq, et leur bravoure était digne des lions. Mais, hélas, leur mission fut vaine. Ils revinrent bredouilles, car le roi du pays voisin n’avait jamais vu même le bout des oreilles des précieux lapins blancs.

« Sire, nous avons une autre idée, » dirent alors les chasseurs. « Les renards ont sûrement emporté vos lapins dans leurs terriers. Nous allons les retrouver ou, du moins, en découvrir la vérité. » Sans attendre, ils s’enfoncèrent dans les bois avec leurs fusils, prêts à tout. Bang, bang, leurs tirs résonnèrent dans la forêt, mais cela ne servit à rien. Les mignons fugitifs du petit roi restaient introuvables.

Les domestiques du petit roi, pleins d’espoir, se rendirent au parc. En se pressant, ils disaient : « Si les lapins sont quelque part, ils doivent être ici »

Ils cherchèrent dans chaque coin et décidèrent de demander de l’aide au policier du parc.

Mais ce dernier, d’un ton très sérieux, déclara : « Les lapins blancs aux yeux et oreilles roses n’ont pas le droit d’entrer dans le parc. » Et ainsi, les domestiques, déçus, durent rentrer au château les mains vides, comme tous les autres avant eux.

Pendant ce temps, le jardinier du roi se rendit en hâte dans son jardin en se disant : « Il ne me restera plus une seule feuille ! » Mais en arrivant, il trouva toutes les feuilles intactes. Les fleurs roses ouvraient doucement leurs pétales au soleil, et les blanches dansaient doucement dans la brise. Pourtant, il ne vit aucune trace des lapins blancs aux yeux et aux oreilles roses.

La petite fille du jardinier, Peggy, se rendit d’abord au clapier. Bien qu’elle sache déjà que les lapins n’y étaient plus, elle décida de commencer sa propre quête. Mais il fallait bien commencer quelque part. Personne, même pas le petit roi lui-même, n’aimait les créatures au pelage blanc immaculé autant que Peggy.

Elle connaissait leurs noms, leurs âges et leurs friandises préférées. Chaque matin, après son petit-déjeuner, elle avait l’habitude de monter joyeusement depuis la petite maison où elle vivait avec ses parents pour leur apporter de la laitue croquante et des feuilles de chou bien fraîches.

Mais ce jour-là, en voyant le clapier vide, son cœur se serra et elle broya du noir. Deux grosses larmes brillaient dans ses yeux reflétant sa tristesse. 

Avant même que ses larmes ne puissent couler sur ses joues, Peggy aperçut quelque chose qui la fit sursauter. Dans un coin de la clôture, il y avait un trou, juste assez grand pour que des lapins puissent s’y faufiler. Oubliant sa tristesse, elle sécha rapidement ses yeux, ouvrit le portail, et courut sur la route poussiéreuse derrière la basse-cour.

Les précieux compagnons du petit roi n’étaient pas là, mais dans la poussière blanche de la route, Peggy vit de nombreuses petites empreintes qui ressemblaient à des traces de pattes de lapin. Le cœur battant d’excitation, elle s’exclama : « Oh, c’est donc par là qu’ils sont passés ! » Sans perdre un instant, elle se mit à suivre les empreintes, les yeux rivés au sol.

Les traces menèrent Peggy à une allée ombragée et verte qui partait d’un côté de la route.

« C’est l’endroit parfait pour les lapins ! » pensa-t-elle, son cœur rempli d’espoir.

« Bunny, bunny, bunny ! » appela Peggy d’une voix douce en jetant un coup d’œil attentif à l’intérieur. Mais il n’y avait ni lapin, ni trace de leurs petites pattes. Déçue, elle s’apprêtait à quitter l’allée lorsqu’elle aperçut quelque chose qui la fit s’arrêter net : un bouquet de trèfle vert, tout en lambeaux et déchiré, comme si – oh, comme si – des dents de lapin l’avaient grignoté ! 

« Ce sont bien les dents des lapins qui ont grignoté ces feuilles ! » s’exclama Peggy, ayant la joie au cœur. Remplie d’un nouvel espoir, elle se hâta de descendre l’allée, regardant derrière chaque arbre et dans chaque recoin. À chaque tournant, elle s’attendait à voir leurs petites oreilles roses surgir, mais elle ne trouva rien. 

Au bout de l’allée, deux chemins se présentaient à elle. L’un menait à l’autre bout de la colline. Des empreintes nombreuses parsemaient ce sentier, mais ce n’étaient que les traces laissées par les soldats lorsqu’ils étaient partis à la recherche des lapins. L’autre chemin serpentait le long des bois où les chasseurs s’étaient précipités. L’herbe y poussait drue, et de jolies fleurs y dansaient doucement dans la brise. Pourtant, il n’y a même pas une seule feuille qui portait de marques de dents des lapins. 

« Quelle direction dois-je prendre ? » murmura Peggy hésitante devant les deux chemins. Soudain, une légère brise se leva, effleurant son visage et apportant avec elle un parfum familier. Elle semblait venir d’un endroit bien précis et Peggy le remarqua immédiatement. 

« Je sens des choux ! » s’écria-t-elle, les yeux brillants de malice. Elle suivit la brise, courant le long des bois et bondissant à travers les fleurs comme un lapin joyeux jusqu’à ce qu’elle arrive dans le carré de choux d’une vieille femme du village. 

Et voilà que les créatures à la fourrure neigeuse du Petit Roi étaient installées là, mangeant des feuilles de choux à satiété ! Folle de joie, Peggy se précipita vers le château, ses petites jambes courant aussi vite que possible pour annoncer la merveilleuse nouvelle.

Le petit roi s’avança vers Peggy, le sourire reconnaissant. « Je te donnerai tout ce que tu demandes, même si c’est la couronne de ma tête », déclara-t-il avec enthousiasme.

Autour d’elle, toutes les belles dames et tous les beaux messieurs se pressèrent, impatients de savoir ce que la courageuse fillette allait demander.

« Un carrosse et des chevaux ! » murmura l’un d’eux, les yeux brillants.

« Un sac d’or, c’est ce qu’il faut ! » chuchota un autre.

« Une maison et des terres, bien sûr ! » s’exclama un troisième avec conviction.

Mais Peggy savait exactement ce qu’elle voulait.

Faisant une élégante révérence, elle leva ses yeux vers le petit roi et dit : « Si vous le voulez bien, Votre Majesté, je voudrais un lapin blanc pour moi. »

Le roi, surpris par la simplicité de sa demande, réplica joyeusement : « Un lapin blanc, dis-tu ? Eh bien, je vais t’en donner deux ! »


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